L'histoire :
Février 1896. Quelque part au milieu du Pacifique, un homme est secouru tant bien que mal. Déshydraté au dernier degré, fiévreux, il frôle la mort. Sans l'assistance d'un bateau passant de façon providentielle à côté, la chaloupe qu'il occupait seul se destinait à devenir son tombeau flottant à ciel ouvert. Le lendemain, un homme se tient à ses côtés lorsqu'il se réveille. Il se nomme Montgomery et dit au rescapé qu'il fut Docteur. Il se sert un verre de spiritueux et demande à l'homme qu'il a arraché des griffes de la mort ce qui l'a amené à dériver en pleine mer. Celui-ci se présente : il se nomme Edward Pendrick. Épris de sciences naturelles, il effectuait un voyage scientifique dans les mers du Sud quand un incendie se déclara sur le Lady Vain. De tout l'équipage, il n'y eut que trois rescapés, mais au bout de quelques jours, ses deux compagnons d'infortune s'entretuèrent. Montgomery juge que son hôte est trop fatigué pour poursuivre, à moins qu'il ne considère en savoir déjà assez. Il interrompt donc ce début de conversation et promet à son nouveau passager, alors qu'il va quitter la cabine, qu'un repas lui sera amené sous peu...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le roman d'H.G Wells et le film des années 30 ont propulsé le Docteur Moreau au rang des monstres sacrés, juste « derrière » Frankenstein et Dracula. Certes, la figure du funeste scientifique est un peu moins universellement connue, peut-être un peu plus « réservée aux littéraires ». Il n'en reste pas moins un personnage aussi effrayant que les deux monstres et il partage avec eux un point commun : son sort interroge celui de l'Humanité toute entière. Wells avait choisi d'inscrire sa fiction dans son temps : les faits se situent en 1896, date de parution de son ouvrage. Cet aspect, à l'époque contemporaine, contribua à captiver les lecteurs. L'autre élément remarquable est la narration à la première personne. Car Prendick exprime toute la terreur qu'il a vécue, du premier au dernier chapitre, ce qui fait que le lecteur l'absorbe et la ressent à son tour. Un procédé narratif que Lovecraft utilisait aussi souvent qu’excellemment.... Stéphane Tamaillon fait une adaptation assez réussie, même si, cette fois-ci, l'histoire n'est pas présentée à la façon d'un témoignage. Cela ne l'empêche pas de véhiculer tension et mystères. Certes, de larges ellipses ont été nécessaires, mais ce premier volet contient tous les « temps forts » du roman et l'ensemble fonctionne bien. Joël Legars propose un dessin nerveux contrebalancé par des couleurs qui ne sont jamais ternes ni criardes. Il a la faculté remarquable de camper hommes et monstres tantôt attachants, tantôt particulièrement inquiétants. Si bien que cette première partie nous entraine avec plaisir, qu'on connaisse ou pas le roman, et elle augure d'une suite qu'on présuppose tout aussi réussie.
