L'histoire :
Au début du Ve siècle, l’expansionnisme des Huns force les wisigoths à migrer vers l’ouest. Ils passent le Danube et accèdent aux portes de Rome. A Ariminum (actuelle Rimini), en cette nuit d’hiver de l’an 408, des guerriers wisigoths pénètrent dans une riche villa romaine. Ils massacrent les deux femmes qui s’y trouvent et blessent gravement un enfant prénommé Lucius… que finalement ils emmènent avec eux. 11 ans plus tard, à Tolosa (actuelle Toulouse), le roi Wisigoth Théodoric répartit ses reiks (chefs guerriers) sur différentes propriétés romaines de la région. En effet, les riches romains acceptent bien volontiers que ces barbares campent sur leurs terres, pour assurer leur protection contre les bagaudes (bandes de pillards) qui sévissent. Thorulf, l’un de ces reiks wisigoths, part donc avec sa tribu sur les terres d’un dénommé Gallius. Sa troupe se compose notamment d’un prêtre, Livtrasir, et de son brave fils de 16 ans, Wotila. Au cours des jeux d’adolescent de ce dernier, l’un de ses rivaux dans le cœur de sa cousine Valdamarica, le traite un jour de bâtard. Et d’affirmer publiquement que Liwtrasir n’est pas son vrai père. Bizarrement, cette calomnie laisse Wotila tout pantois… se pourrait-il qu’il ait raison ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La collection Histoire et histoires de Delcourt s’enrichit d’une nouvelle saga pétrie de rigueur historique, pour nous éclairer sur une période relativement floue de l’Histoire européenne : les « invasions barbares » qui érodèrent l’empire romain à partir du Ve siècle. Bizarrement, cette époque charnière où l’antiquité a laissé place au moyen-âge a rarement été traitée en BD. Heureusement, quelques explications didactiques (en préambule, puis lors d’un glossaire annexe) nous immiscent dans le contexte. Cette longue phase de déliquescence se focalise ici sur la période où wisigoths et romains devaient cohabiter dans le sud-ouest de la Gaule, au travers d’un « partenariat win-win » (l’occupation gracieuse contre la protection). Le récit scénarisé par Hervé Pauvert met en scène un jeune héros tiraillé entre les deux civilisations : Wotila, adolescent wisigoth, est en effet né romain sous le nom de Lucius. Entre palabres politiques, croyances religieuses ou païennes, il apprend ses origines dans la douleur, supporte d’inquiétantes visions, vit le début d’une idylle et participe à des rites ancestraux (encore en vigueur aujourd’hui : le carnvalos, ancêtre du carnaval). Ce destin, à suivre dans un tome 2 déjà annoncé pour 2012, est mis en images par Cécile Chicault, qui se lance ici dans un projet autrement plus costaud que sa gentille Zélie, petite sorcière pour enfants. Son style graphique peine à convaincre lors des séquences d’action, légèrement figées, ou lorsqu’il troque les arrière-plans pour un simple aplat de couleur (la planche 31). Néanmoins, son trait fin et particulièrement soigné, complété par une colorisation impeccable, colle assez bien aux représentations de l’époque, bien avant l’« invention » de la profondeur de champ (à la Renaissance). La mise en bouche sérieuse de cette saga peinera peut-être à séduire, initialement, mais elle mérite assurément le détour en raison de ses grandes qualités historiques…
