L'histoire :
Plutôt bon élève en philosophie, Samuel rend pourtant une copie quasi-vierge le jour de l’épreuve du baccalauréat. A sa décharge, il faut dire que son grand-père maternel (mort en déportation quelques mois avant sa naissance), Yeshkeshel Szpiegelglass, est venu le troubler pendant l’épreuve, en l’empêchant de mener à bien sa réflexion. Un cheminement intellectuel parfumé par les théories de Karl Marx, qui ne fait pas bon ménage avec celui de l’aïeul, constamment dicté par les livres saints et les 613 commandements. Mais peu importe cet échec : Samuel n’a pas l’intention de faire de longues études. Son objectif est plutôt de devenir un révolutionnaire professionnel, pour en finir avec le capitalisme et l’exploitation de l’homme par l’homme. Il milite d’ailleurs activement à l’Organisation des Travailleurs Prolétariens où il a pris le pseudonyme de Prométhée. Aussi, il souhaite désormais en devenir l’un des permanents. Mais Carlos, le secrétaire général du mouvement, ne le voit pas de cet œil là : Samuel doit faire ses preuves en confrontant ses idéaux sur le terrain et en devenant ouvrier. Cependant, les usines qu’il démarche le trouvent soit chétif, soit trop ou pas assez qualifié. Il lui reste néanmoins une solution : intégrer la société de prêt-à-porter de son père. Même si l’idée le répugne au départ, il en devient pourtant le directeur de collection atypique, qui ne tarde pas à s’imaginer faire la révolution par les vêtements...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Soyons franc. Ne tournons pas plus longtemps autour du pot : cette adaptation faite de bulles et de cases donne surtout l’envie de se précipiter sur l’œuvre éponyme originale d’Adam Pianko. Loin de nous l’idée de vouloir jeter la moindre pierre au travail graphique de Nicolas Winz : le trait original, de facture nouvelle vague, plutôt vif et habile à transcrire les mouvements ou la judicieuse colorisation, sont des petits « plus » incontestables que l’œil sait apprécier. Mais très rapidement, au bout de quelques planches, et sans même avoir lu le roman publié en 2005, le cadre choisi pour l’adaptation se révèle étriqué. Malgré les quelques 150 pages, la place est insuffisante pour savourer pleinement des dialogues au cordeau ou s’attarder sur quelques uns des personnages qui le méritent amplement. Peut-être la mise en scène souffre-t-elle d’un manque d’ambition. Toujours est il qu’on se régale tout de même à suivre ce jeune lycéen malmené par le poids de l’héritage familiale (la famille juive est décidément une inépuisable source d’inspiration) au moment même où il s’affirme idéologiquement (comme bon nombre de ses camarades) et où il voudrait vivre une sexualité épanouie : une analyse drôle et subtile des conflits intérieurs qui nous hantent parfois et dont on croit pouvoir s’affranchir. La métaphore du pavé qui donne son titre à l’ouvrage est particulièrement bien trouvée et résume à elle seule le cheminement opéré. Un album en demi-teinte, donc, qui loin de desservir le roman d’Adam Pianko n’apporte pas ce petit quelque chose qui fait le sel des adaptations réussies.