L'histoire :
Ce jour là, Tibert le chat s’en vient trouver Renart en tant que messager du roi. Après tant de vilénies, notamment à l’encontre d’Ysengrin et de Brun, Renart est honni au château : il y est donc convoqué, de son plein gré, avec une corde pour y être pendu ! Evidemment, la reddition n’est pas vraiment dans les intentions de Renart, qui propose plutôt à Tibert de se restaurer. Il emmène alors le chat au pied d’un grenier rempli d’avoine et de froment. Le chat grimpe aisément jusqu’à une anfractuosité et… déclenche le système d’alarme (ficelle et clochette) mis en place par le paysan pour choper ce maudit goupil ! Et tandis que Tibert, tombé dans le piège tendu par Renart, est roué de coups de bâton, son compère en profite tranquillement pour se faufiler chez le paysan et lui voler une pleine meule de fromage ! Enragé par cet énième échec, le roi prend donc une mesure radicale : il mobilise son armée et fait le siège de la tour de Maupertuis, où résident Renart et sa famille. Mais là encore, les soldats se heurtent aux milles astuces et tromperies de Renart pour repousser les assauts. Ce coquin-là profite même de la nuit pour investir en douce le camp du roi et lui jouer de bien mauvais tours…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En marge des « blockbusters » répondant aux attentes d’un public en matière d’intrigue ou de dynamisme, Jean-Marc Mathis et Thierry Martin terminent tranquillement l’adaptation trilogique d’écrits fondateurs, quasi millénaires, recueillis en un Roman de Renart. Au XII et XIII siècle, plus de 80 000 vers rédigés en octosyllabes par plusieurs auteurs, constituaient alors la première œuvre pamphlétaire à l’encontre du clergé ou de la noblesse. Les rôles et déterminations zoomorphiques des personnages sont ici chargés de symboles : Renart, roi du système D, représente le petit peuple, le loup Ysengrin la bourgeoisie, le blaireau Grimbert le clergé et l’ours Brun la noblesse. Néanmoins, dans les faits, tous sont présentés comme appartenant à la noblesse, Renart y compris, qui habite la tour de Maupertuis. A ce sujet, notons qu’un premier clin d’œil au Roman de Renart avait déjà été fait chez Delcourt par Alain Ayrolles dans De cape et de crocs avec le renard Armand de « Maupertuis » et le loup Don Lope Villalobos « Y Sangrin ». Mais revenons à nos moutons. Dans cet ultime volet, la satire malicieuse, pittoresque, grivoise et pas forcément morale, perdure habilement, car elle peut s’apprécier par un très large public (c’est tout de même édité dans la collection « Jeunesse »). Soulignons d’ailleurs la maestria de Mathis en matière d’adaptation et le talent graphique de Martin pour retranscrire sagement mais pertinemment la chose. Les six chapitres tendent logiquement cette fois vers la chute tant méritée du perfide Renart. Appelé à comparaître dans le premier, il est assiégé et capturé dans le second, tente une ruse pour s’échapper dans le troisième, passe en jugement dans le quatrième et se fait battre en duel dans le cinquième. Un épilogue lui accorde un sursaut, portant à la postérité une mentalité frondeuse et intemporelle qui semble inscrite dans les gênes des français. Une brillante adaptation d’un classique, à conseiller à tous publics !