L'histoire :
L'enquête se poursuit autour des cadavres de femmes découverts dans la crypte sous la Tour de la Réconciliation. L'attentat qui a tué plus de 30 personnes en ce début 1934, au cœur de Metropolis, capitale de l'Interland, a eu plusieurs effets, probablement escomptés. Semer le doute sur la pérennité de l'union franco allemande présidée sous la direction de Briand et Stresemann, mais aussi révéler un secret probablement plus complexe encore sur les origines de la tour. Le suicide de l'architecte qui l'a conçue, l'origine bientôt découverte des dents humaines envoyées à son domicile, tout semble devoir rendre le mystère de plus en plus épais. Gabriel et le commissaire Lohmann, surveillés par Freud et la présence étonnante de la très belle Loulou, progressent par à-coups. Lorsque les vigiles du centre d'où proviennent les explosifs qui ont permis l'attentat sont mis en garde à vue, ils sont froidement exécutés par l'un d'entre eux. Il semblerait donc qu'un nouveau complice se révèle pour les enquêteurs mandatés par la Directoire. Mais son lien avec les extrémistes allemands des Loups Noirs est-il avéré ? Les indices qui se regroupent ne sont-ils pas un vaste piège ? Gabriel poursuit à l'instinct, profitant sans scrupules des penchants violents du commissaire Lohmann, alias M. Jusqu'à une découverte fortuite et marquante, qui va changer le cours de l'enquête.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Serge Lehmann poursuit son uchronie savamment tarabiscotée au cœur d'une Europe qui se serait construite sur une union franco-allemande. Cette union fragile regorge de tensions, symbolisée par la ville de Metropolis qui comporte une grande part de mystères. Le scénariste adore les mises en scènes dramatiques, bourrées de références aux classique de la BD ou du cinéma, sans oublier les personnages célèbres qui apparaissent sous leurs vrais noms ou sous des pseudos, comme la belle Loulou, alias Louise Brooks. Pour mettre en valeur ses idées foisonnantes, Lehman peut compter sur le talentueux Stéphane de Caneva, dont le style se rapproche des comics en noir et blanc des années 70. Une esthétique à la Bernie Wrightson, entièrement tournée vers le suspense et la dramatisation. Les deux complices créent une aventure pleine de rebondissements qui peut se lire sans aucune arrière-pensée, ou avec le degré de recul du lecteur averti qui cherchera le culot ou l'habileté dans leur travail. Petit à petit, les mystères s'éclaircissent, et ce troisième volume (sur quatre) nous fait faire un grand pas, très attendu. Il n'est pas certain que toutes les hypothèses lancées dans de multiples directions trouvent chacune une explication en bonne et due forme, mais après tout, est-ce si important ? La série continue de nous tenir en haleine sans ralentir. Les auteurs connaissent et utilisent les codes classiques d'une bonne mise en scène, et savent emmener le lecteur exactement au rythme qu'ils ont choisi. Habile et bien foutu.