L'histoire :
Germano arrive par le train dans une ville de province du sud de l’Italie, par une chaleur suffocante. Cette canicule a visiblement perturbé la circulation des trains, car le sien a près de 6 heures de retard. Il appelle aussitôt sa fille pour la prévenir qu’en raison du retard, il la retrouverait le lendemain directement sur le lieu de son exposition. Il va rejoindre directement son hôtel. Un quidam lui indique le chemin, à pied, à partir de la gare, à travers un vaste parc. Germano prend son courage à deux pieds, et marche. Or une fois à arrivé à l’hôtel, il découvre l’établissement en pleine effervescence. Un mariage est en effet organisé ce week-end là et… il apprend que sa réservation a été libérée, en raison de son retard. Germano se retrouve dépité et démuni dans le hall, à attendre que l’agent d’accueil – débordé – lui trouve une solution… Ce faisant, il est abordé par une femme d’âge mûr, qui lui demande gentiment de retirer son pied du bas de sa robe. Germano est confus : il y a désormais la trace de sa chaussure sur la robe blanche de cette convive pour le mariage. Or la dame trouve cela plutôt cocasse et sans gravité. Elle s’éloigne tandis que Germano s’en va prendre patience en faisant un tour du parc, toujours sous une chaleur de dingues…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après Come Prima, récompensé d’un fauve d’or à Angoulême 2014, Alfred persiste avec un autre roman graphique intimiste se déroulant en Italie. Et contrairement à ce que vous pensez, Senso n’est pas une gamme de machine à café à capsules. C’est l’histoire d’un homme et d’une femme (chabadabada) qui ne se connaissent pas mais se rencontrent et se trouvent fortement attirés l’un par l’autre. Ou, du moins, fortement en adéquation à ce moment T de pause-bilan sur leurs vies, pour la durée d’une soirée et d’une nuit de mariage. Ils sont un peu paumés tous les deux au milieu de leurs destins et cette perte de repères les place simplement, fortuitement, magnifiquement, sur la même fréquence d’extériorisation. Auteur complet, Alfred sait y faire pour leur attribuer des parcours circonvoluants et entrecroisés à travers ce parc immense, cette nuit intense et cette chaleur ardente. Ils se découvrent, s’éloignent, se recroisent… et puis quoi ? On vous laisse découvrir cela. Cette lecture reste de bout en bout attachante et touchante, car elle pose des questions essentielles sur ce que sont nos vies solos ou de couples. En outre, le rythme narratif, les séquences contemplatives et ce dessin qui n’hésite jamais à prendre toute la place et tout son temps, permettent admirablement ce moment de répit et d’introspection. Quelques séquences hot interludes, muettes et bien plus poétiques qu’obscènes, réservent tout de même ce one-shot aux adultes.
