L'histoire :
C’est le premier jour d’entrée en 6ème, dans un nouveau collège, pour Elliot. Il débarque assez logiquement dans la cour de récré avec une boule d’angoisse… qui se matérialise à ses côtés, mais seulement à ses yeux. Cette boule d’angoisse lui explique qu’elle apparaîtra à chaque fois qu’il sera en panique psychologique, pour formaliser toutes les raisons – justifiées ! – de ses angoisses. Là, par exemple, tout le monde a remarqué au premier coup d’œil sa tête de bébé… Alors il a intérêt à se faire rapidement oublier, afin de ne pas être identifié comme faisant partie des boucs émissaires possibles. Car Elliot n’a pas le profil du « leader », alors mieux vaut qu’il se range dans la catégorie sécurisante des « spectateurs ». C’est toujours mieux que celle des « bouffons ». Or ça tombe bien, un autre garçon prénommé Hari vient vers lui et lui demande direct s’il accepte d’être son ami. Ouf, un groupe de deux, c’est infiniment mieux qu’être tout seul. Hari lui explique et lui montre ce qu’est le beatbox : faire des trucs de rap avec la bouche. Or comme il le fait super bien, il y a rapidement un attroupement autour d’eux… dont des leaders. Le lendemain, Hari et Elliot tentent de sympathiser avec (de s’adjoindre la protection de) une fille super forte, qui sait se faire respecter…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans une veine similaire aux Cahiers d’Esther de Riad Satouff, Elliot au collège propose de nous immerger dans la peau et les angoisses légitimes d’un jeune collégien qui entre en 6ème. A la différence d’Esther, Elliot n’est pas la fille de l’auteur Théo Grosjean, mais son alter-ego du passé, essentiellement constitué de ses souvenirs et de ses observations extrapolées d’autres collégiens. Comme la peluche-tigre Hobbes pour Calvin dans Calvin et Hobbes, le jeune héros a un ami imaginaire qui permet à l’auteur de formaliser ses interrogations existentielles et son état d’esprit. La thématique du « gars flippé » est particulièrement prédominante dans l’œuvre de Grosjean (L’homme le plus flippé du monde, Le spectateur). Cet ami imaginaire a la forme d’une boule d’angoisse – une sphère beige sur pattes. Elle se formalise à ses yeux uniquement et il discute avec elle (dans sa tête !). Ce procédé est un classique habile pour aborder et tourner en dérision les non-dits, les impressions, les angoisses et les sentiments. En préface bédédessinée, Grosjean explique que ce tome est le premier d’un vaste projet qui l’amènera à suivre Elliot jusqu’à ses années lycées… voire le plus longtemps possible, afin de suivre son évolution psychologique, son fil du destin. Le dessin stylisé se place dans une veine trondheimienne, influence notable de l’auteur : des grosses têtes, un trait fin encré, propret, inscrit dans un découpage serré (de gouttières blanches sans bordures de cases), avec une colorisation en aplats de teintes plutôt orangées.