L'histoire :
Au large du cercle polaire arctique, en 1897, le navire de Robert E. Peary zigzague entre les icebergs, à travers la tempête, en direction du continent américain. L’explorateur revient à nouveau bredouille de son expédition, qui visait à être le premier à trouver le pôle nord. Enfin, bredouille… pas tout à fait. Car dans la cale, 6 Inuits ont accepté de le suivre, contre la promesse de grands cadeaux pour leur village. Opiniâtre, Peary compte quant à lui sur ce « trophée » pour créer l’évènement et susciter la curiosité du grand public, dans le but évident de trouver des financements pour une nouvelle expédition. Effectivement, à New-York, les esquimaux font tout d’abord sensation ! Puis Peary les confie au docteur Boas, du Muséum d’Histoire Naturelle, à des fins d’études anthropologiques. Parmi eux, se trouve un enfant, Minik, qui découvre la société occidentale avec étonnement. Il prend un bain dans de l’eau qui fume, il découvre l’aberration du zoo… et se noue d’amitié avec un enfant de son âge, le fils de l’administrateur du muséum, Wallace. C’est d’ailleurs à la famille de ce dernier que l’enfant sera définitivement confié lorsque son père Qisuk et les autres succomberont tous à la grippe…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Difficile d’aborder cette histoire romancée à partir d’un « fait divers » réel, sans faire la comparaison avec un album concurrent, Groenland Manhattan, sorti à 6 mois auparavant et racontant strictement la même chose… Visiblement, le scénariste Richard Marazano a eu accès aux mêmes sources d’inspiration que Chloé Cruchaudet, ce qui n’empêche pas les deux one-shots d’être tout à fait dissemblables dans leur traitement graphique et narratif. On retrouve donc le petit Minik, enfant sauvage propulsé – et rapidement isolé – au milieu de notre civilisation occidentale. Après avoir été une attraction scientifique, au terme d’une confrontation avec le monde urbain et ses horreurs, il refoulera notre appareil social inhumain et individualiste. Le choc culturel déroule fatalement son issue dramatique. On pense au film de Truffaut, à Greystoke, et on se réjouit de suivre cette aventure cette fois sous les crayonnés savamment « pastelisés » d’Hyppolyte (Le maître de Ballantrae !). Ancien élève de Christian Lax, Hyppolyte montre une patte graphique moderne et très spontanée, d’un équilibre et d’une cohérence rares. L’association pour la première fois de ces auteurs aux talents aiguisés, tous deux pour la première fois chez Aire libre, contribue à faire de Minik un bel album, un indispensable de cette rentrée 2008…