L'histoire :
Dolores City, petite ville poussiéreuse à la frontière du Texas et du Nevada, vit au rythme de sa mine de borate… et des frasques de Calamity Jane. Replongée dans ses vieux démons, la célèbre tireuse noie ses tourments dans un mauvais whisky, qu’elle cuve dans les endroits les plus improbables. Ce matin-là, c’est dans l’enclos à cochons qu’on la retrouve, au grand désarroi des notables et des dames bien-pensantes, outrés par son comportement. Dans le bureau du shérif, les figures influentes de la ville somment Bill Hickok, vieil ami de Jane, d’agir avant que la ville ne perde le peu de respectabilité qu’il lui reste. Depuis que Hickok fait régner l’ordre d’une main ferme — et d’un colt encore plus rapide — les hors-la-loi se tiennent à distance. Mais face à Jane, même lui baisse les bras. Pour tenter de calmer le jeu, il fait appel à leur ami commun Charlie, espérant éloigner la jeune femme après une nouvelle échauffourée. Mais le shérif n’a guère le luxe de se disperser : à la lisière de Dolores, une mystérieuse famille vient d’emménager dans une ferme isolée. Dix têtes de bétail, des visages fermés et des explications floues… L’intuition d’Hickok lui souffle que ces nouveaux venus n’apportent rien de bon. Et il n’a pas l’habitude de se tromper.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans ce cinquième opus de la remarquable série Wild West, Thierry Gloris et Jacques Lamontagne poursuivent leur plongée dans les zones d’ombre de l’Ouest américain, à travers des figures désormais bien connues des lecteurs. Dès les premières planches, le récit s’impose avec tension et densité. Gloris, toujours aussi habile, tisse une intrigue captivante, où chaque révélation alimente le suspense avec justesse. Fait marquant : Calamity Jane, jusque-là figure centrale, s’efface au profit du shérif Bill Hickok, désormais au cœur de l’histoire. Ce choix narratif recentre le propos sur une figure de loi en lutte, non seulement contre le crime, mais contre les dogmes d’une communauté dominée par la foi. Car dans ce Far West pétri de contradictions, la justice des hommes se confronte à celle de Dieu. Entre règlements de comptes et sermons enflammés, le récit explore cette ligne trouble où les coups de feu et les prières se disputent le droit de juger. Gloris montre avec finesse une Amérique pionnière rongée par ses certitudes morales, où la foi devient parfois plus oppressante que la loi. Graphiquement, Jacques Lamontagne continue d’imposer son style unique. Son trait précis, expressif et fouillé donne vie à un Ouest rude, sale, tangible. Il y a chez Lamontagne une science du cadrage et de la mise en scène qui sert à merveille la tension dramatique du récit : chaque case semble composée comme un tableau, avec une profondeur remarquable. La lumière, les ombres, les visages marqués : tout concourt à installer une atmosphère lourde. La colorisation, légèrement désaturée, souligne cet équilibre fragile entre beauté et désespoir. Rédemption s’impose ainsi comme une nouvelle pépite dans une série qui confirme une fois encore la richesse narrative du western quand il est entre de bonnes mains.