L'histoire :
Année 1906 – En sa ville de Saint-Pétersbourg, le Tsar est préoccupé par les grèves qui se multiplient et paralysent le pays. Il craint des débordements qui à Moscou sont légion, des affrontements nombreux éclatant entre les manifestants et les forces de l’ordre. Les rapports de la police secrète sont clairs : le moindre incident pourrait être fatal à son règne. Décembre 1916 – Bernard de Chartres poursuit la rédaction du rapport demandé par sa Sainteté. Il en oublie même de manger, ne sortant de sa cellule de Matines qu’à l’invitation du nonce. Le Pape se tient informé régulièrement du contenu et de l’avancée des travaux du moine redoutant qu’un scandale n’éclabousse l’Eglise. Car à l’été 1906, Raspoutine était déjà devenu un familier de la noblesse russe, fréquentant notamment les duchesses Militza et Anastasia, proches de l’impératrice. Le faux prophète leur parle en privé de sa Sibérie natale, la « vraie » Russie, il gagne un peu plus chaque jour leur confiance et comme le dit son compagnon Johannes : le loup est entré dans la bergerie. Finalement, un après-midi d’octobre, Raspoutine est reçu par Nicolas II dans ses appartements, entouré de sa famille. Le moujik flaire la santé fragile du petit Alexis. Peut-être est-ce le moyen de pénétrer encore plus les hautes sphères du pouvoir ? Mais en haut lieu justement, le personnage commence a agacer très sérieusement…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Comment dresser le portrait d’un homme à la fois si fameux et controversé ? La figure du Faux prophète Raspoutine n’en est pas à sa première apparition en bande dessinée, tantôt excentrique aux côtés de Corto Maltese (Hugo Pratt), toujours à demi-fou au travers des multiples caricatures qu’il a inspirées. Tarek choisit, lui, un angle plus historique, quoique aussi ésotérique, ce dernier aspect étant ici nettement en retrait. En effet, le Manuscrit (cf. t.1) interdit passe au second plan pour une présentation plus « personnelle » du parcours ascendant du sulfureux personnage. Ni blanc, ni noir, Raspoutine apparaît comme un moujik en quête d’une place au soleil. Il cherche ainsi à se rapprocher de la famille impériale pour s’extraire d’une trop modeste condition sociale et combat les puissants au nom du peuple de la « vrai Russie » (sa Sibérie natale) dont il se veut le champion. En dépit de ses penchants lubriques et d’un isolement croissant, ses ennemis nantis étant légion, l’imposteur gagne au fil des pages une réelle profondeur humaine en grande partie grâce à l’attitude de son secrétaire et « ami » Johanes, qui ne peut s’empêcher d’éprouver à son égard une réelle empathie. Le dessin signé Vincent Pompetti renforce cette impression d’une vérité disséquée, mise à nue, hautaine et crue à la fois. Aux couleurs, Rémy Langlois fait un sans faute légèrement « passé », pour un ensemble de qualité, fouillé et en définitive bien plaisant : conclusion très prochainement…