L'histoire :
Le petit Jacques Terpant ouvre le prologue de l'album sur ses souvenirs de jeune garçon avec son père près de la maison familiale, dans la campagne dauphinoise. Dès 1025, le jeune « Ragner », seigneur du fief d’Hostun, va conforter sa place pour longtemps. Bien après, c’est « La guerre de Jean » (Terpant), en 1676, qui illustre authentiquement la vie rurale simple. Encore plus tard, une histoire de remords répare une injustice immobilière de famille. Au milieu du XIXème siècle, un jeune prêtre arrive à Hostun et lutte pour la réparation de l’église ou son remplacement par un nouvel édifice. Les fleurs de partance, presque sans histoire, sauf la fragilité d’un jeune homme, témoigne du temps qui passe, tout en représentant les animaux, impassibles et bienveillants. Là où je vais la nuit est un rêve dans lequel l’auteur se décrit dans une mystérieuse promenade en forêt, puis avec quelques personnes de sa connaissance.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Impossible de résumer cet album de plus de 110 pages, mais de grands chapitres peu nombreux, confortables en longueur, prennent le temps de faire découvrir des épisodes vécus ou vraisemblables. Le sanglier, aperçu çà et là, sera comme un fil conducteur énigmatique, symbolisant la partie indomptable, naturelle, de ces campagnes montagnardes. Terpant nous surprend une nouvelle fois, après tant d'albums originaux, aux charmes indéfinissables. Sa façon unique de représenter les paysages, les corps, les animaux, fait merveille dans ce récit minimaliste mais de longue haleine. Contrairement à ses grandes séries passées (notamment Sept cavaliers, Le royaume de Borée), il n'y a pas de grande épopée, mais une description qu'il a voulu authentique, modeste, évocatrice des temps anciens. De petits évènements, et non des grands, sont ainsi contés tranquillement, avec cœur, via le graphisme qu’on lui connaît depuis longtemps : solide mais sensible, authentique mais éclatant, avec des couleurs choisies, un charme mystérieux. Ici sa technique utilise les encres de couleurs, ce qui donne un rendu plus intense. Le climat mystérieux installé par Terpant nous invite à nous attarder amplement, calmement sur une planche, une description. Le rythme doux, bienveillant, raconte sans l'air d'y toucher, au fil des pages calmement envoûtantes. C'est beau, la force tranquille. Un très bel album, à savourer : l’auteur a déclaré que ce serait sa toute dernière bande dessinée !