L'histoire :
En septembre 1878, Robert Louis Stevenson est en villégiature en France, dans le massif central, dans la petite commune du Monastier-sur-Gazeille. Il écrit à sa mère et à son ami Charles Baxter qu’il a besoin de 40£ pour s’acheter un âne, afin de convoyer quelques affaires à pied, jusque Alès. Il achète effectivement une vieille ânesse 65 francs, qu’il baptise Modestine. Son précédent propriétaire l’appelait juste « bourricot ». Il charge un maximum d’affaires sur son dos et prend la route sous le regard amusé des gens du cru. Le jeune homme de 28 ans n’a en effet que peu d’expérience en matière de chargement… et ses affaires menacent déjà de tomber après quelques mètres. On l’aide et on le salue… Stevenson est parti. Les premiers kilomètres, Modestine trotte « avec une élégance discrète dans l’allure ». Mais bientôt, alors qu’ils doivent monter une côte en forêt, elle s’arrête et ne veux plus repartir. Stevenson essaie de la faire avancer par tous les moyens, mais il se refuse de battre une « créature de l’autre sexe » ! C’est finalement un pèlerin de passage qui lui apprend à tailler un bâton et à lui fouetter l’arrière-train en sifflant des « Vrouiiit, Vrouiiit ! » Modestine gambade de nouveau, Stevenson est reparti…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce Voyage avec un âne n’est certes pas le périple le plus aventureux qu’a narré Robert-Louis Stevenson. Ici en effet, nulle quête de trésor, pas plus que d’étrange cas de docteur transformiste. Le trajet a cependant authentiquement été parcouru par l’écrivain écossais, alors âgé de 28 ans et en villégiature en France, après s’être brouillé avec son père. Le jeune et chétif RLS refusait alors d’embrasser la profession de constructeur de phares, que les hommes de la famille se transmettaient de pères en fils ; et pour ne pas arranger ses affaires, il venait de renier sa foi. Stevenson creusait alors sa vocation de grand voyageur en se faisant oublier dans le Massif Central français. On ne sait pas trop la raison précise de ce voyage à pied entre le Monastier et Alès… mais qu’importe. Jack London théorisera plus tard ce principe : Ce n’est pas la destination qui compte, c’est le voyage. La forme qu’a pris celui-ci, son sens initiatique, est le vrai sujet de cette adaptation par le scénariste Christian Perrissin de Voyage avec un âne dans les Cévennes, qui paraitra l’année suivante (1879). De bivouacs en auberges, de rencontres en anecdotes culturelles et historiques, Stevenson découvre la ruralité auvergnate, la psychologie de l’âne, les techniques d’harnachement… Il se nourrit de ses rencontres, rumine ses souvenirs et ses espoirs. Et voilà de quoi remplir 173 pages, régulièrement accompagnées par un narratif en voix off manuscrite, qui reprend des extraits de l’œuvre originale. Michael Sterckeman dessine ce voyage pédestre et animalier à l’aide d’un lavis en noir et blanc, qui ne fait guère honneur aux magnifiques panoramas du Velay, de la Lozère et du Gévaudan. Evidemment, le seul monstre que croisa alors Stevenson, fut cette bougre d’ânesse têtue comme une mule.