L'histoire :
Ils sont bien curieux, les petits Luca et Leïa : les voilà en plein diner qui somment leur parents de leur raconter leur rencontre et leur premier baiser d’amoureux. Etienne, le papa, promet. Tandis que la maman laisse son homme jouer les remueurs de mémoire…Tout remonte à l’été 1986. A l’époque Etienne, dit Chouine, a 9 ans. Il est passionné par la piraterie et tout ce qui va avec (trésors, combats, femmes…). Et puis aussi carrément dingo de la petite Marie, la plus belle fille de l’école, au mignon petit nez parsemé de tâches de rousseur. Le hic est que Marie habite rue Perron, la rue-même où vit La Rousse, une gamine à sang bouillant, âgée de 10 ans. Certains prétendent qu’elle serait la fille d’une sorcière. Et justement, Etienne déteste La Rousse (qui le lui rend bien). Alors pour sceller cette haine, il imagine un drôle de jeu qui permettrait d’opposer gamins de la rue Beaulieu (la sienne) et ceux de la rue Perron. Un soir, dans le sous-bois derrière le « 24 logements », il expose les règles de la partie : une guerre de pirates dans laquelle on doit voler à l’équipe ennemie la carte au trésor, l’épée du capitaine et le drapeau de l’autre clan…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
L’exercice proustien qui consiste, à la faveur de quelques planches de BD, à remonter à la vitesse de la lumière dans un coin enfoui de son enfance, fonctionne ici impeccablement. En supplément, joliment dynamisé par une narration moderne, le dessin emprunte l’énergie et parfois le trait caricatural du manga ou du cartoon. Il serait fort à parier qu’il convienne à un très large lectorat. Cette « Madeleine » dégainée avec jubilation par Michel Falardeau prend les accents d’une Guerre des boutons made in Québec, au milieu des années 80. Pas de Longeverne et de Velrans, mais les pensionnaires – de 5 à 11 ans – des rues Beaulieu et Perron, opposés dans un jeu façon pirates avec batailles, repaire, sabre du capitaine, carte et trésor adverse à dénicher. A la tête de chacun des clans, Etienne Chouinard (dit Chouine) et La Rousse (prétendument fille de sorcière) animés par une haine mutuelle irréversible. C’est Etienne qui, pressé par ses enfants, se prête au jeu nostalgique des souvenirs d’enfance, une fois adulte. Le but : raconter comment il a rencontré leur maman et leur premier bisou d’amoureux. Vous l’aurez compris, la maman en question participait à cette guerre fratricide et le papa en était secrètement amoureux. Au final, effectivement un baiser baveux avec la langue (le fameux « French Kiss ») et en bonus une belle surprise amenée avec malice… Voilà en tout cas une virée sympathique dans un univers obligatoirement familier, pour une déclinaison aventurière, rigolote et rythmée. Et puis évidemment, l’idée que les amours d’enfance sont toujours ceux qu’il faut le plus prendre au sérieux...