L'histoire :
Hadrien est un enfant éduqué avec rigueur par sa mère catholique. Il se sent à l’étroit dans cette famille sévère et son petit village de Bretagne n’est pas plus intéressant. Il rentre alors au collège religieux du village, mais beaucoup d’élèves se moquent de lui, pensant qu’il est trop sérieux et peu fait pour la vie en communauté. Peut-être ont-ils raison, après tout ? Lors d’un match de rugby, Hadrien est sévèrement plaqué par le « grand » du collège, Jérémie. Le nez ouvert, il est obligé de se faire soigner à l’infirmerie. De retour dans les vestiaires, Hadrien croise Jérémie et ce dernier ne cesse de s’excuser. Hadrien craque et relâche ses nerfs en l’accusant de tout. Surpris, Jérémie a envie de faire sa connaissance…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Voici un album atypique, au format à l’italienne, qui fraye au côté de grands noms des romans d’apprentissage sur l’enfance. Entre le désabusé L’attrape cœur et le sombre Les désarrois de l’élève Törless, l’opus raconte les errements d’Hadrien qui n’arrive pas à trouver sa place. Malheureux dans sa famille et incompris à l’école, l’enfant ne peut exister sans souffrir. Torturé par la rigueur de sa mère et par l’obscurantisme des autres, Hadrien découvre en fait qu’il est homosexuel. Le récit bascule alors dans une belle histoire d’amour impossible. Tous les épisodes vécus par Hadrien sont autant d’échecs qui prouvent que la vie est impossible pour des êtres qui ne rentrent pas dans le moule étroit fondé par les autres. Sombre et pessimiste, le récit décrit une chute de plus en plus lente, mais inexorable pour le pauvre Hadrien. Traînant sa silhouette frêle, l’enfant « modèle » n’a aucune échappatoire dans un monde où personne ne le reconnaît. Avec finesse et sensibilité, Hubert laisse les émotions venir d’elles-mêmes à travers les dialogues. Simple mais profond, l’album touche au plus près d’un adolescent écorché qui ne peut exprimer ses idées et ses sentiments au monde. Le dessin d’apparence « rigide » de Marie Caillou est parfait également pour représenter cette déchéance. Ne vous laissez pas abuser par son aspect faussement naïf : la narration se montre au contraire très cruelle. Le trait épuré caricatural, voire quasi-géométrique, qui fait parfois penser au style de Charles Burns, se complète de teintes froides et délavées, comme pour mieux représenter l’absence d’espoir et d’humanité qui se dégage. Ainsi formé, le dessin semble dépourvu d’émotions, même si les personnages sont extrêmement vivants. Après le débat sur le mariage homosexuel, cette belle représentation de l’adolescence touche juste. Suivez la ligne droite…