L'histoire :
En compagnie de Sarah, à bord rafiot chargé de mystérieux bidons, Lambert fuit Lagos et son passé de pirate, le cap verrouillé sur l’océan Indien. Ils sont des desperados qui rêvent de reconstruire une nouvelle vie, sous des latitudes éloignées de leurs exactions sanglantes. Hélas, leur tracé les mène tout droit vers un terrible ouragan. Sarah est épouvantée par la hauteur des lames… Lambert, lui, côtoie une nouvelle fois la mort : il est dans son élément. La violence de la tempête est inouïe. Leur bateau est soulevé, retourné, déchiqueté… Sarah est éjectée et Lambert ne doit sa survie que parce qu’il se sangle autour du mât. Epuisé d’avoir lutté contre les éléments déchainés, assommé par le mât qui se brise sur lui, il perd connaissance. Il se réveille plusieurs jours plus tard sur une mer d’huile, seul, assoiffé, avec une fracture ouverte à la jambe gauche. Il redresse sa jambe, la ceint d’une attèle et s’évanouit de nouveau. C’est le goéland qui vient de lui crever l’œil à coups de bec qui le réveille. La nuit suivante, il délire : il se voit mis à l’épreuve de chasser le requin par deux fantômes issus de son passé…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après avoir fait une longue pause dans le neuvième art pour devenir scénariste pour la télévision allemande, Matthias Schultheiss est dernièrement revenu à sa planche à dessin. Après trois one-shot, il reprend cette fois son emblématique série ultra-violente des années 80, mettant en scène un pirate moderne, violent et dénué de toute humanité. Or qui dit nouveau cycle dit « renaissance » nécessaire. Celle-ci se fera logiquement par l’eau, un ouragan aussi féroce que peut l’être la personnalité de ce pirate sans scrupules, un tumulte interminable et essentiellement visuel, qui dure une grosse quinzaine de planches. Avant cela, une scène de torture en flashforward ouvre le bal pour redonner le ton : ça va de nouveau verser dans l’horreur. Malgré les 25 années séparant les deux cycles, Lambert garde donc le cap immédiat de sa fatalité dévastatrice. La folie sanglante à laquelle il s’adonne dans la seconde partie de l’album tourne à l’excès. Schultheiss guiderait-il uniquement son intrigue selon ses velléités de séquences barbares ? On peine à saisir où l’auteur veut nous emmener… en tout cas, un nouveau contexte est bel et bien défini. On note surtout que le scénario est définitivement plus limpide, mais c’est aussi parce que son canevas est relativement simple (un ouragan + une pèche délirante au requin). Le dessin réaliste est désormais numérique, mais toujours aussi abouti ! On note quelques sautes de style et/ou de techniques : le graphisme du flashforward diffère de celui de l’ouragan, qui diffère aussi de la « séquence naufragé » qui s’ensuit. On sent que Schultheiss varie les plaisirs, mais toujours avec réussite. Certaines cases et planches sont réellement virtuoses…