L'histoire :
Novembre 1918. La première guerre mondiale vient de se terminer, mais Silas Corey, infiltré en Bavière, a découvert une Allemagne en état de siège dans un climat insurrectionnel. Poursuivi par des policiers dont on ne sait pas qui ils servent, l’ordre, le désordre, le pouvoir – quel pouvoir ? – Silas Corey doit être sans pitié et en abattre plusieurs pour défendre sa vie et celle de Nina Zichler. Traversant Munich avec la jeune femme blessée, Corey est intrigué par des affiches de propagande d’un mouvement antibolchévique et antisémite qui célèbre un quasi-culte au Dieu Wotan, nom germanique d’Odin, dieu de la fureur et de la victoire guerrière… Après avoir déposé la belle blessée chez un ami sûr, Vitaly, un peintre russe qui élève des lapins dans son appartement, Silas Corey se rend dans un hôtel dont l’adresse est celle du commanditaire des affiches haineuses. Il y retrouve Rudy Von Sebotendorff…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans ce second diptyque, on est loin, très loin de la légèreté dandy-canaille du premier diptyque. Cette fois Corey est aux prises avec les forces du mal, tel un Indiana Jones avant l’heure. Le scénariste Fabien Nury, à travers ce mystérieux mouvement furieusement antisémite et antibolchévique, fait une analogie avec le père du nazisme, l’Ordre Germanique, issu de la « loge Wotan ». L’atmosphère campée de concert par Nury et Pierre Alary, assombrie encore par le magnifique travail de Bruno Garcia aux couleurs, offre un climat crépusculaire qui cadre parfaitement le temps de l’action : on est vraiment dans une période hors du temps, où l’Allemagne peut basculer dans un chaos indicible, dans la guerre civile, ou pire. La peur et la haine sont partout, et on sait bien qu’elles mènent vers le côté obscur. Le travail semi-réaliste d’Alary est une nouvelle fois bluffant. Son trait fin et élégant donne une touche smart et un peu rétro à un dessin pourtant résolument moderne. Les personnages, comme les paysages, sont magnifiquement soignés et les cadrages et les mouvements sont particulièrement réalistes. Le couple avec Fabien Nury est parfaitement rodé, l’action est découpée de manière efficace qui tient le lecteur en haleine durant tout l’album. Vraie réussite, cet opus est pourtant dérangeant, tant on a envie de s’illusionner sur l’issue de l’aventure. Il n’empêche que la série est désormais installée et qu’on attend avec impatience un nouveau cycle de ce héros, finalement pas si cynique que ça, comme le note le peintre Vitaly.
