L'histoire :
Un jeune couple se promène dans une forêt du Limousin, afin d’y faire des photos de la nature. Au bord d’un étang, ils trouvent un campement : une tente igloo, un feu de camp éteint et – plus curieux – un téléphone portable abandonné sur un rocher. Intrigué, le jeune homme ouvre la tente. Il trouve à l’intérieur les cadavres de trois corbeaux éventrés, disposés en triangle, avec les viscères qui se rejoignent au milieu. C’est une infection… Le couple s’enfuit. Le jeune homme sera retrouvé vivant, mais sa compagne dévorée par… une meute de loups ! En tout cas, c’est la version du survivant, lorsqu’il est interrogé par les gendarmes, en état de choc. Sa compagne est en effet salement amochée. Il est totalement improbable qu’il soit à l’origine d’un tel déferlement de hargne carnivore. Or au même moment, le psychopathe qu’on a surnommé l’homme bouc, le dénommé Constantin Verger incarcéré dans un QHS, réclame la visite de Blanche Fontaine, la shamane qui a contribué à son arrestation. Cela interpelle les autorités, car il était resté mutique depuis son arrestation 2 ans plus tôt. Il dit alors à Blanche qu’il a « vu » en rêve une femme blonde, avec des yeux de reptile, portant une couronne d’épines, se faire empaler sur les bois d’un grand cerf. Il a aussi vu « l’enfant démon », qui erre parmi les loups et qui réclame d’être remis dans le droit chemin…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Vous aviez aimé L’homme bouc, publié par les éditions Robinson en 2020 ? Vous êtes du genre à tracer des pentacles, avec du sang de vierge, entourés de bougies et à invoquer Satan ? Alors vous allez apprécier cette « suite » proposée par Komics Initiative – qui ne réclame pas nécessairement d’avoir lu l’ouvrage précité. On retrouve ici le personnage de la shamane, Blanche Fontaine, qui aide cette fois la police à enquêter sur la présence d’un « enfant démon » dans les bois, et donc d’un déferlement de violence sanglante. Comme souvent dans ce registre, le milieu contemporain rural et forestier du Limousin sert de contexte inquiétant, suffisamment en retrait de la civilisation pour constituer un terrain propice à l’installation de forces maléfiques. Comme Hannibal Lecter dans Le silence des agneaux, notre Homme bouc refile des tuyaux depuis sa cellule pour orienter les procédures shamaniques de l’heroïne. Les mêmes auteurs sont aux manettes de ces forces obscures : au scénario, Corbeyran surfe sur les archétypes du genre, cultivant les ambigüités et les mystères, entièrement au service des ambiances horrifiques. Au dessin, Aurélien Morinière se fait plaisir lors des séquences montrant le petit monstre humanoïde entouré de loups, évoluant dans les taillis à la lueur de la lune. Les cases oniriques pleines pages, les chevaliers de l’apocalypse, les noces de l’homme bouc, les illustrations d’entrées de chapitres et les séquences nocturnes flippantes dans les bois valent le détour. Dommage qu’il n’y ait pas de codex pour décrypter le langage runique de l’enfant démon prononcé dans les phylactères.