L'histoire :
Californie du Sud, pendant l'entre-deux-guerres. Alan Ingram Cope est né en 1925 à Alhambra, une banlieue de Los Angeles. De cette ville, il n'a que peu d'images. Pareil pour son père dont il n'a que des « souvenirs vagues ». C'est à l'âge de 17 ans qu'il s'installe à Santa Barbara pour étudier à l'université. De maison en maison, Alan raconte son enfance passée dans cette région des Etats-Unis. Entre l'invasion d'escargots dans la cuisine, la découverte de son corps et les souvenirs refoulées, Alan y raconte la vie quotidienne d'une simple famille pendant la Grande Dépression et l'éveil d'un enfant à l'existence... Des jeux de voisinage aux réunions de famille, un témoignage intimiste au cœur des Etats-Unis d'avant guerre.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après La Guerre d'Alan – éditée de 2000 à 2008 puis réédité sous forme d'intégrale en 2009 et 2012 – c'est logiquement qu'Emmanuel Guibert signe son retour avec une « suite » en forme de flashback dans L'enfance d'Alan Ingram Cope, américain installé en France et devenu par la suite l'ami de l'auteur. On a dit par ailleurs tout le bien qu'on pensait de l’œuvre de Guibert (Le Photographe, La fille du professeur, Les sardine de l'espace) mais ici, force est de reconnaître que la BD nous est un peu tombée des mains au bout de 30 pages. Entendons-nous bien : graphiquement, Guibert maîtrise son sujet à la perfection. Bien que trop illustratif ou redondant avec le texte par moment, le trait à l'encre de Chine réussit à restituer les souvenirs, à les rendre présents, à les interpréter même, oscillant entre réalisme photographique, illustration basique et fantaisie évocatrice. Un dessin plein de grâce. Pour le fond, c'est une tout autre histoire. L'auteur fait platement raconter à Alan Cope son passé, ses souvenirs et anecdotes en Californie du Sud. Et ensuite ? Pas grand chose, à vrai dire. On veut bien croire qu'Alan était un homme pétri de qualités, sûrement intéressant et d'une profonde humanité... Mais faire raconter son enfance – somme toute très ordinaire – sur un ton neutre et froid, ne suffit pas à en faire un récit palpitant et, dans la BD, quelqu'un de simplement touchant ou attachant. Pire, une fois la dernière page fermée, on reste tout à fait indifférent à son destin. D'autres seront émus et rétorqueront justement que la grande force de Guibert aura été d'avoir su nous captiver avec l'enfance d'un anonyme, par une narration très littéraire touchant à l'universel et un dessin stylé...A chacun de voir. Orphelins d'une réponse quant au réel intérêt de l'histoire, on ressort avant tout déçus par ce récit factuel et monotone...