L'histoire :
Dans la ville sainte de Hiérus Halem, le cœur du sultan du croissant et des sables est prisonnier d’une princesse chrétienne. Sentant au fond de sa cellule le vent du danger souffler sur son peuple, le mufti d’Alkar décide alors de sortir de son recueillement. Il se rend au palais du sultan Ab’Dul Razim, et l’attend dans la chambre de la princesse Syria. Il l’avertit alors du grand danger qui le menace. Le temps des songes prometteurs s’achève. Afin d’éviter de nouveau d’attiser le feu de la guerre, et de l’éteindre définitivement, le sultan révèle au mufti qu’il a le pouvoir de faire taire le cœur du très vénéré X3, le saint sépulcre de la cité sainte, cause et raison de l’acharnement des chrétiens à vouloir libérer Hiérus Halem. Le mufti apprend de la bouche du sultan que ce pouvoir lui a été donné par l’envoyé du Qua’dj, l’esprit Sar Mitra. Sondant le cœur de Syria, la jeune princesse chrétienne, il le voit pur, mais ses craintes se révèlent fondées : elle a rencontré Sar Mitra, et le maître de ce dernier lui a réclamé le miroir de vérité qu’Elysande, la Lumière des Martyrs, lui avait confié. Elle lui avoue cependant ne plus savoir où celui-ci se trouve. Une autre femme détient dorénavant le miroir, et ce qu’elle y voit du reflet de son âme, la force à constater que son cœur n’est désormais plus pur. Ce n’est autre que l’ex-compagne de Robert de Tarente et la nouvelle du Maître des Machines, nouveau guide de la chrétienté !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avec Becs de feu Jean Dufaux et Philippe Xavier nous livrent une conclusion brillante d’un cycle de Croisade. Tous les acteurs de l’épopée sont en place : les chrétiens, menés par le Maître des Machines, les Sarrasins et le sultan Ab’Dul Razim, et les mercenaires. N’oublions pas les Djinns et autres créatures fantastiques. Dufaux pose habilement et avec grande maîtrise les enjeux de chaque partie en présence : pour les chrétiens, il s’agira d’avoir accès au Saint-Sépulcre ; pour les sarrasins, garder la ville sainte ; et pour les mercenaires, forcément, les trésors issus du pillage des territoires conquis. Chacun d’ailleurs se rattache à un artefact, symbole matériel des ambitions du cœur et de l’âme. De cette histoire, Dufaux en tire une aventure fantastique parsemé de symbolisme et de mythes. On ne peut s’empêcher d’assimiler Hiérus Halem de Jérusalem, X3 de Jésus Christ et Ab'dul razim de Salladin. Et pourtant, rien de religieux dans ce récit, bien au contraire : Gauthier de Flandres, chrétien d’obédience, sauve le peuple juif et se lie d’amitié avec les musulmans. Cette liberté lui coûte d’ailleurs bien chère. Face aux tourments des hommes et à leur folie destructrice, emplie de haine et couleur sang, il intervient avec bravoure et courage. Mais son but n’est-il pas de s’abandonner aux sables du désert ? Une trame profonde, maîtrisée de bout en bout par Dufaux, et servi par un génial Xavier, au sommet de son art. Des dessins épurés, aux traits précis et clairs, mais respectueux du moindre détail et intenses. Et que dire de la transposition du littéraire au graphique des personnages fantastiques, tels le Aa, le mufti d’Alkar, le Maître des Machines, sans oublier Le Qua’dj ! Et bien sûr, le dessinateur nous gratifie à nouveau de magnifiques cases panoramiques l’éditeur du traditionnel « quadriptyque » (deux pages de visu s’ouvrant vers l’extérieur). Avec Croisade, un mythe s’achève, ainsi qu’une œuvre en tous points remarquable. Le Chevalier des Sables (« suite » prévue des aventures de Gauthier de Flandres) parviendra t-il à se hisser au même niveau ?