L'histoire :
A la frontière entre la vie et la mort, le professeur Yves Frehel se souvient des évènements qui l’ont conduit à se retrouver dans le coma. Au labo 11, il menait en solitaire des travaux portant sur l’oxydation des cellules humaines, facteur du vieillissement naturel. D’après sa récente découverte, son hormone « Créatine B » permettrait d’influer sur cette oxydation, ce qui signifierait retarder de manière significative le vieillissement humain. Génial ! Or, sans avoir parlé de ce sujet de recherches à personne, les travaux de Frehel font l’objet d’un article dans un mensuel de vulgarisation scientifique, ce qui déchaîne une pluie de coups de fil très intéressés à son domicile. Ses patrons américains se font soudain également insistants et une tension se noue. En fait, Yves n’est pas certain que cette découverte lui appartient réellement. D’un point de vue éthique, l’avenir de l’humanité est tout de même en jeu : un groupe privé, quand bien même il s’agit de son employeur, ne peut s’arroger la propriété exclusive de l’hormone. Il se remémore alors la course-poursuite dans des ruelles, toujours la même (cf. épisodes précédents), qui a découlé de cette pression et qui a mené à son assassinat. Mais une variante opère cette fois dans ce souvenir : il assiste ensuite, impuissant, à son propre enterrement. Puis il finit par se réveiller en sursaut dans la peau d’un producteur de cinéma lambda, en proie à ce cauchemar récurrent de funérailles d’un autre. Bien sûr, ces « souvenirs » sont des manipulations psychiques assénés par une équipe de scientifiques alors qu’il est dans le coma, pour l'amener à révéler la formule de sa créatine B…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après deux premiers volets relativement semblables, le lecteur finissait par être rompu aux manipulations mémorielles dont est victime le héros. A chaque début de séquence, on ignorait jusqu’alors si ce dernier évoluait dans une réalité fabriquée ou fidèle à une réalité « réelle » (sic). Ce jeu de faux-semblants répétitifs pouvait paraître facile tant que leurs finalités restaient inconnues. Enfin, dans ce tome 3, les choses se précisent : Rodolphe dévoile l’essence de son scénario, alléchant et haletant, de manière parfaitement cohérente. Ces manipulations psy high-tech à la Frontière de la mort sont à la (dé-)mesure de l’enjeu : il s’agit ni plus ni moins que du secret de l’immortalité et donc de l'avenir de l'humanité… Rarement le genre du thriller psychologique aura aussi bien porté son nom ! Le dessin réaliste de Bertrand Marchal, même s’il manque un peu de caractère, ajoute pour beaucoup à la crédibilité du récit. En outre, mise en scène, découpage et cadrages sont subtilement alambiqués pour livrer une intrigue captivante de bout en bout. Si une frange du suspens se lève avec ces révélations, la tension monte donc logiquement d’un cran dans ce troisième volet, également déjà avant-dernier de la série. Gargh…