L'histoire :
De nos jours, la petite Elsa se réveille en pleine nuit. Elle sort alors de sa chambre et retrouve sa grand-mère Dounia dans le salon. Celle-ci a l’air toute triste en regardant de vieilles photos. Comme Elsa insiste pour comprendre pourquoi, Dounia lui raconte la tragédie qu’elle a vécue quand elle avait son âge, c'est-à-dire à la fin des années 30. A l’époque la guerre contre les allemands été terminée, puisqu’on l’avait perdue. Dounia et ses copains Catherine et Isaac continuaient donc leur train-train scolaire sans autre forme d’inquiétude. Mais un jour, Isaac était ressorti tout triste de sa classe et tout muet. Le soir même, le papa de Dounia lui annonçait une grande nouvelle : on leur a proposé de devenir une famille de shérifs : ils vont donc pouvoir porter une étoile jaune sur la poitrine ! Toute fiérote, Dounia réalise les jours suivants que le port de l’étoile n’est pas très bien considéré par les autres : on l’installe au fond de la classe, plein de copains ne veulent plus jouer avec elle… elle s’inquiète aussi pour Isaac qui ne revient plus à l’école. Pour se protéger, la famille décide de ne plus trop sortir. Et puis une nuit, c’est l’angoisse totale : tandis que la police tambourine à la porte, les parents de Dounia la cache en toute hâte dans le double fond d’une armoire, en pleurant et en lui disant qu’ils l’aiment très fort…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La shoah… Tous les adultes connaissent globalement ce mot et ce qu’il signifie. Mais comment expliquer avec la juste mesure toutes ces horreurs à un enfant ? Le scénariste Loïc Dauvillier se trouvait dans la situation idoine, intermédiaire disons, pour s’attaquer à ce devoir de Mémoire : il a une petite fille à qui il souhaite léguer cette importante leçon de l’Histoire ; et son grand-père résistant lui a jadis narré son expérience, par bribes, selon sa maturité. Son récit met donc en scène une fillette juive cachée par ses parents, qui seront déportés sans elle (cette séparation suffit amplement à aborder la terreur). Ensuite, Dauvillier maintient son focus sur la petite Dounia : l’univers des enfants est d’abord centré sur eux-mêmes. Ses craintes, ses espoirs, son périple, permettent de faire comprendre beaucoup de choses… et l’horreur des camps d’extermination est juste suggéré, à travers le retour « très fatigué » d’un des personnages. Car si l’Homme est capable des pires atrocités, le récit montre qu’il est aussi capable d’une grande humanité (les voisins sont des « justes »). Au dessin, Marc Lizano emploie sa griffe stylisée et moderne personnelle : des grosses têtes rondes sur des petits corps rabougris, souvent cadrés de près. Les dialogues sont simples et adaptés sans être infantilisants, si fait que ce one-shot peut-être apprécié par un très large public. Une belle leçon d’Histoire et d’humanisme, qu’il est nécessaire de partager avec le plus grand nombre.