L'histoire :
La caverne de Platon : Socrate explique à son ami Glaucon que les êtres humains préfèrent souvent l’illusion à la vérité. Pour le lui prouver, il lui demande d’imaginer que des hommes sont enfermés dans une grotte depuis leur enfance, et que des liens les obligent à regarder dans une direction unique : la paroi du fond de la grotte, sur laquelle défilent des ombres. Car dans le dos de ce public captif, des créatures mystérieuses fond passer des objets devant un gros feu, créant des ombres en mouvement que le peuple prisonnier prend pour le réel, faut de n’avoir jamais vu autre chose que ces illusions. Imaginons alors que nous libérions ces prisonniers et que nous leur fassions découvrir le monde réel ! Ils refuseraient tout d’abord de croire que le monde extérieur est le vrai monde. Puis après avoir constaté l’inéluctable, ils refuseraient de retourner dans la caverne.
Le bateau de Thésée : Un groupe de sophistes (les ancêtres de la pensée scientifiques) s’intéressent au mythique bateau de Thésée, le fils du roi Egée, qui vainquit le minotaure selon la mythologie. Conservé depuis des centaines d’années, ce navire a régulièrement été restauré pour éviter qu’il ne s’abime, au point que toutes ses pièces ont fini par être toutes remplacées. Est-il donc toujours l’authentique bateau de Thésée ? Peut-on rester identique tout en changeant entièrement ? Le même cas de conscience se pose quand on se baigne dans un fleuve : on ne peut pas entrer une seconde fois dans le même fleuve, car ce n’est jamais la même eau qui vient à nous…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En préambule, le professeur de philo Etienne Garcin explique qu’il a constaté que les « petites histoires » qu’il racontait à ses classes captaient systématiquement l’attention de ses élèves, bien mieux que les grands principes abstraits de sa matière. Qu’ils soient réels ou fictifs, les fragments de vies racontées mobilisent inévitablement nos facultés de jugement, notre logique. Et pourquoi ne pas mettre en scène les grandes paraboles philosophiques en bande dessinée, pour mieux illustrer précisément la réflexion philosophique ? Dont acte. Avec la connivence du dessinateur A.Dan, au dessin semi-réaliste crayonné et coloré, Garcin met ainsi en scène 10 allégories, dans le contexte des époques où elles ont été émises, et dans lesquelles il apparait tel un guide s’affranchissant du temps : le mythe de caverne de Platon (ou la quête de la vérité), le bateau de Thésée (ou l’identité sans cesse menacée), la sandale d’Empédocle (la vie a-t-elle un sens, puisqu’on doit mourir ?), les poires d’Augustin (c’est quoi, le mal ?), le roseau de Pascal (l’homme est un roseau qui pense), le danseur de Nietzsche (l’homme est-il maître de son destin ?), le geste de Lafcadio (a propos du déterminisme humain), le garçon de Sartre (n’existe t-on qu’à travers autrui ?), la tique de Deleuze (ou la pluralité des perceptions du monde). Les concepts sont pointus et ils sont abordés en profondeur, pas toujours avec le sens de la « vulgarisation » qui aurait été nécessaire, du moins pour se mettre à la portée du quidam d'intellect moyen. Malgré le vecteur « simplifié » de la bande dessinée, ils nécessitent que le lecteur soit prêt à faire l’effort cérébral de les appréhender et de les comprendre, quitte à revenir plusieurs fois dessus. A lire avec parcimonie.
