L'histoire :
25 août 1572. Dans les rues de Paris, le peuple catholique en rage contre les protestants est en train de générer des milliers de morts. Dans une chaleur accablante, le terrible massacre de la Saint Barthelemy continue de faire couler le sang ; il s’étendra à la province. Dans l’hôtel particulier de l’ecclésiastique et papiste Lorenzo Scipio, le jeune huguenot Eli Sauveterre est inconscient, en train de se remettre de ses blessures. Il est veillé par celle qu’il croit être sa sœur Loïse… et qui est en fait sa demi-sœur. En effet, sa famille a été scindée une quinzaine d’années auparavant, en raison d’un terrible secret. En 1552, François de Sauveterre (le père d’Eli) et Lorenzo Scipio étaient camarades de combat à la bataille de Gorze, contre les allemands. François tentait alors, en vain, de convertir Lorenzo à la réforme luthérienne. Leur amitié avait amené François à inviter Lorenzo sur ses terres et à lui présenter son élégante épouse, Aude… Hélas, ce qui devait arriver arriva : les jumeaux Clément et Loïse étaient la descendance de sang de Lorenzo. Lorsqu’il s’était aperçu de cette relation adultère, François avait étranglé son épouse de ses mains, laissant croire qu’elle était morte en couche. Apprenant la mort d’Aude et la furie de son ancien ami, Lorenzo avait juré de récupérer ses enfants. Il les avait donc enlevés quelques années plus tard et éduqués dans la foi catholique…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le mécanisme religieux et politique, infernal et démesuré, qui aboutit, il y a 445 ans, au massacre de la Saint Barthelemy, a été bien décortiqué au cours des deux précédents volumes de ce triptyque. Il est temps pour le scénariste Pierre Boisserie d’éclairer le lecteur sur cette curieuse famille de Sauveterre, particulièrement déchirée entre deux confessions antagonistes. En quelques flashbacks, nous apprenons ainsi la tromperie, la rage meurtrière, le désir de vengeance… Nous comprenons la raison du kidnapping et les conséquences de deux éducations rivales et fanatiques. De nos jours, c’est à peu près le même processus qui aboutit au problème de l’islamisme extrême. En ce sens, Saint Barthelemy fait un écho intéressant au terrorisme morbide et aveugle actuel, avec un demi-siècle de décalage (rappelons que le calendrier hégirien place le monde musulman de 2017 en 1439). La dimension de ce 3ème et dernier tome est cependant plus romantique et dramatique qu’historique. L’entre-déchirement familial sur fond de tensions politiques a quelque chose de shakespearien, que la virtuosité du dessin d’Eric Stalner conforte très agréablement. Que de magnifiques vues plongeantes sur Paris (p11, 17, 25, 36, 40...), des scènes de massacres marquantes (p.29), et les nombreux palabres nécessaires au dénouement se font en costumes d’époque tout à fait réalistes. Ce triptyque fera foi (!) concernant l’évènement majeur de la Saint Barthelemy. Plus globalement, il développe une des origines de la déviance meurtrière humaine qui ponctue régulièrement et paradoxalement la construction de notre humanité.