L'histoire :
Le monde de l'entreprise est violent en général. Celui de La Poste, en particulier, ne déroge pas à la règle. Max a pu le vérifier. Simple postier, il côtoie au quotidien Jocelyne, Yann et René, travailleurs fatigués par la répétition de tâches simples et ordinaires. Précarité et lassitude se sont emparés de chacun. Raison de plus pour aller tiser, un soir par semaine, histoire de décompresser. Mais un jour, lorsque un nouveau financier arrive, la morosité routinière va peu à peu se fissurer, pour révéler au grand jour les tensions latentes et exacerber certaines jalousies ou ressentiments. Relations de pouvoir, chantages, jeux de séduction régissent un système aliénant et déshumanisant, où la seule règle qui vaille est celle, sinon de la réussite contre tous, du moins la survie de chacun. Fut-ce au prix de dénonciations ou de compromissions...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Jonathan Larabie plonge son lecteur dans le monde aliénant du travail, celui des compromis et de l'hypocrisie généralisée. Pour acteurs, des employés de La Poste moins fainéants par nature que broyés par un système déshumanisant. Au menu, des petits chantages, des arrangements, des planqués, des ambitieux, des syndicalistes carriéristes, des délateurs faibles, des pressions quotidiennes venues des patrons... Bref, Jonathan Larabie dresse un état des lieux sombre et pessimiste, influencé par des références marxistes qui fleurent bon la lutte des classes. A l'appui d'un propos intéressant et toujours sérieux, l'auteur use logiquement d'un dessin minimaliste, colorisé d'une bichromie terne. Parfait pour décrire l'ennui et la morosité ambiantes. Aussi, l'auteur évite-t-il l'écueil des clichés ronflants sur le monde de l'entreprise, sans toutefois parvenir à se détacher suffisamment des caricatures d'employés. Sur la durée, on regrettera une prise de position pas suffisamment partisane, le message perdant un peu de sa force, arrivé à la moitié ; et le graphisme qui se contente d'illustrer, sans aller beaucoup plus loin. Le monde du travail, assimilé ici à un système de domination et d'exploitation, source de souffrance, broie lentement les individus. Partant de ce postulat, Larabie s'emploie à la démontrer. Moins une manière pour lui d'opposer un droit à la paresse, que de retrouver le sens réel du travail. Un travail dans lequel les hommes pourraient enfin se reconnaître. Au final, un récit d'aliénation sociale assez bien vu, globalement...