L'histoire :
Escorté par une escouade de soldats, Dahouti, le très-haut-prêtre, s’est éloigné des limites du territoire dévolu aux Aana (des humanoïdes). La perte récente de sa femme et du bébé qu’elle portait l’a profondément atteint. Il renie sa foi et s’ouvre les entrailles avec ses ongles, jusqu’à s’en extraire le cœur. Il rend ses pouvoirs à ce dieu égoïste et par là-même, fragilise considérablement l’utilisation de la magie chez ses pairs. Dans la capitale Nekhen, cette fracture dans le continuum est ressentie par Aha, un haut-prêtre nain, joyeux, lubrique et… invulnérable. En effet, quelle que soit la blessure qu’on essaie d’infliger à Aha, rien ne pénètre sa chair. Le nain en profite donc pour se saouler et s’adonner à la gaudriole la majeure partie de son temps. Il est la honte de ses pairs. A l’issu d’une nuit de débauche en compagnie de deux filles de joie, lorsqu’il repère au lointain l’éclair provoqué par l’acte de Dahouti, un frisson lui parcourt toutefois l’échine. Il compulse aussitôt ses parchemins pour tenter de comprendre ce qui se passe. Les autres prêtres de son ordre sont également en alerte maximale. Tous les peuples de ce monde, humanoïdes et zoomorphes, sont désormais en grand danger…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce premier épisode met en place ce qui deviendra un diptyque proche de l’heroïc-fantasy façon Lanfeust. En effet, dans le monde imaginé par Emmanuel Despujol, un flux magique général se partage entre quelques hauts-prêtres humanoïdes (la race des Aana) et peut se trouver fragilisé. Ce monde au décorum antico-oriental est habité par neuf races, dont huit ont des apparences zoomorphiques issues de bêtes sauvages (Ded-Wen, Khnoum, Aarcha, Deb, Meser, Gahes, Imenty et Hout ont respectivement des têtes de lions, béliers, lézards, hippopotames, crocodiles, antilopes, dobermans, taureaux). La composition de cet univers s’assimile au fil de la lecture, en parallèle de la présentation qui nous est faite du héros. Il est nain, se prénomme Aha (oui, comme le groupe pop norvégien des années 80) et son invulnérabilité lui permet toutes les débauches : alcool, sexe, je-m’en-foutisme jovial… ce qui le rend forcément sympathique. Or la « démission » choc du plus puissant prêtre, par laquelle s’ouvre la problématique, va amener ce héros lubrique au cœur des débats : il devient un émissaire clé, à la rencontre des autres peuples, pour envisager une réaction commune. Cette mise en bouche ne révolutionne pas le genre, mais elle se laisse suivre de fort agréable manière. Notamment en raison de son dessin soigné, de son univers abouti, et de ses protagonistes expressifs, selon une veine semi-réaliste maîtrisée. Bizarrement, la conclusion est déjà attendue dans le second volet… n’est-ce pas là un développement d’intrigue un peu court, vue la dimension de l’univers développé ?