L'histoire :
Il fallait s’y attendre : comme rien n’a changé dans nos mentalités occidentales, la planète est devenue un dépotoir géant et terriblement toxique. Inutile d’espérer sortir sans masque à gaz ; la quasi-totalité des espèces animales a disparue ; le monde n’est plus qu’urbain, synthétique et archi-consommateur. Le pire, c’est que les dirigeants et la population continuent d’encrasser comme si de rien n’était. Sam et Daphné, un jeune couple, vit dans ce contexte, en compagnie de la grand-mère. Avec la canicule, ils déplacent d’ailleurs Mamie de son fauteuil roulant jusque dans le congélo, pour partir en vacances tranquilles. Une fois à la plage, ils hésitent à s’installer à côté de raffinerie de pétrole ou à côté des cadavres purulents de cétacés. De retour, ils suivent à la télé les exploits du tagueur « Flower Power », qui peint des fleurs sur les murs de la ville pour revendiquer une conscience écolo naissante. Jusqu’au jour où Sam s’aperçoit avec effroi que le tagueur n’est autre que son pote Tran… et que Daphné appartient elle aussi à la mouvance ! C’est alors que débarquent chez lui ses parents, exilés depuis 15 ans dans une communauté à la campagne. Ils lui présentent sa petite sœur baptisée Orchidéa, en hommage à la fleur légendaire et aujourd’hui disparue…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Répondant à sa conscience écolo et stimulé par la vague environnementale actuelle, David Ratte nous réjouit d’un second recueil de gags sans doute encore plus percutants que le premier. L’auteur aligne cette fois des planches ou demi-planches plutôt inspirées, étoffant en outre la psychologie de ses personnages. Ainsi on découvre Daphné, Tran et la famille de Sam au grand complet, mais aussi le chef d’état tout-puissant et dénué de toute conscience écologiste. Tous conservent néanmoins leurs masques à gaz sur le visage (c’est le concept) et une épaisse fumée toxique décore la plupart des cases. Il est bien entendu conseillé d’apprécier l’humour noir (visqueux) qui fait rire jaune (fluo)… Mais en la matière, Ratte nous gratifie cette fois de plusieurs planches d’anthologie. A l’image de la p.37, très parlante (un iceberg géant se détache de la banquise sous l’effet du réchauffement, et dérive en fondant, jusque dans le verre à whisky d’un industriel qui fête l’installation de sa nouvelle usine). Les bonnes idées pullulent ainsi : la mer d’« huile », la voiture écolo qui roule aux OGM, la déforestation amazonienne au rythme de 6 terrains de foot à la minute (dommage que les brésiliens n’ait pas été amateur de ping-pong). Etant donné qu’en soi, publier une BD est foncièrement polluant, l’éditeur Paquet est même allé jusqu’au bout de la démarche : tout comme le tome 1, ce second volume est imprimé sur du papier certifié 100% PEFC (issu d’un bois provenant de forêt gérées durablement), et avec de l’encre végétale garanti sans alcool. En outre, comme il parait que le rire – quand bien même serait-il cynique – est bon pour la santé, nous voilà sans doute face à la première BD profitable au développement durable !