L'histoire :
Un cavalier en uniforme d’apparat s’approche d’une jeune femme dans une rue en ruine et lui demande ses papiers. Il la met en garde sur les dangers qui la guettent, la pire racaille écume la ville et une étrangère constitue une proie facile. Elle réplique qu’après tout, ils sont des étrangers eux aussi. Le soldat s’offusque de son effronterie et la menace directement pour la prochaine fois qu’ils se croiseront. Elle poursuit son chemin jusqu’à une berge sur laquelle elle a rendez-vous. Une embarcation s’approche avec, à son bord, trois individus : le pilote et deux jeunes hommes qui apprécient d’emblée celle qu’ils doivent escorter. C’est la période des festivités sur lesquelles plane un parfum de politique subversive à base de sectes et de fraternités secrètes. En entrant dans la vielle ville, Anna, Octavius et Antonio mettent le pied à terre. En chemin, Anna demande si l’excitation générale est due aux drogues ou aux thébains qui se font discrets. « Un peu des deux » répond Octavius, qui constate au passage la perspicacité de la jeune femme.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
D’emblée, le format bouscule avec ses 40 cm par 28, qui nécessitent un temps d’adaptation. Andréa Bruno (Bouillon de néant, Samedi répit…) revient sur les conséquences de la guerre sur les peuples, mais aussi sur les jeux politiques qui s’ensuivent. Avec un récit à deux niveaux simultanés : une narration qui place le décor, puis l’action qui en découle. Le découpage de l’histoire est abrupt, le dessin aussi, au pochoir et lavis en noir et blanc contrasté. Le format géant confère un impact supplémentaire et l’aspect figé du graphisme fait de chaque planche un petit tableau. Très symbolique, cette parabole de la société à travers la quête (de vérité, de vengeance ?) d’Anna recèle une profondeur qu’il faut aller chercher. Cette œuvre se situe dans l’art d’essai et stimule la pensée de ceux qui se donnent la peine ; pour la BD de consommation, vous repasserez ! Il faut reconstituer les ruptures, lire entre les lignes… c’est comme si le lecteur suivait l’investigation en temps réel de cette orpheline qui revient sur les terres de son père. Original à bien des égards, Cinéma Zénith est un album qui donne matière à réflexion autrement que par les médias habituels. Ce premier épisode termine sur une porte que l’héroïne s’apprête à franchir, avec en narration « si tu en as l’occasion, jette encore de l’huile sur le feu »…tout un programme.