L'histoire :
Bienvenu à Raminagroville, petite cité provinciale française où résident Modeste Minet, collégien, et son cocker Robert. Tous deux mènent une vie paisible auprès des parents de Modeste, dans un pavillon. Mais les deux amis partagent aussi une identité secrète de super héros sous les traits de Supermatou et son acolyte. Sortant à toute heure de la journée ou de la nuit, après avoir revêtu leurs costumes et masques bleus et rouges, pour accomplir les missions les appelant. C’est ainsi qu’ils interviennent afin de sauver les pauvres fermiers des environs de Raminagroville, d’une opération scélérate expropriant les habitants. C’est en fait là l’œuvre d’Agagax, le bébé dérangé, un super vilain s’étant fait passer pour un fantôme afin de déloger les malheureux et leur racheter leurs propriétés pour une bouchée de pain. C’est encore lui qui provoque un accident, faisant se déverser d’un camion de transport la chlorophylle concentrée créée par le professeur Chanteclair. Résultat : la jungle envahit Raminagroville et la folie s’empare des animaux du zoo, subjugués par la voie autoritaire du bébé malsain, se prenant pour Tarzan.
Dans la tête de turc, les camarades de classe de Modeste vont jouer un tour à leur professeur de math « le père Hypothenus », fan de Supermatou, en lui faisant croire à un rendez-vous particulier avec son héros, afin de lui faire faire n’importe quoi.
Dans Immondices et sable fin, aux côtés de la famille Minet, en vacances à la plage, au milieu des centaines d’autres touristes, on assiste bien impuissant à la surpopulation de cette période et la pollution des lieux. Supermatou et Robert vont devoir mener l’enquête après que d’étranges crabes géants venus des profondeurs ont mené des missions commando nocturnes consistant à pulvériser du mazout sur les indélicats. Qui se cache derrière tout cela ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Un trait « gros nez », un humour au diapason, celui d'une époque révolue, mais tellement dingue. Les moins de cinquante ans ont certainement du mal à imaginer ce qu'a pu représenter ce genre de BD au plus fort de la Pifomania, au mitan des années 70. Pif gadget, journal très populaire, cumulait les bandes dessinées de qualité, ou en tous cas, elles l'étaient pour les millions de lecteurs achetant la revue. Aujourd'hui, toutes ces bandes, aux traits « datés » et à l'humour du même tonneau, contemporains des sketches classiques de Coluche, ne font plus rire les jeunes générations. Et pourtant, lorsqu'on regarde de près la production éditoriale alternative actuelle, son influence se fait tout de même un peu sentir. On pense aux Requins marteaux, Cornélius, 2024, avec entre autres Pierre la Police, Antoine Marchalot, Xavier Bouyssou... Normal, ceux-là ont lu Pif dans les collections parentales. Dès lors, découvrir Supermatou aujourd'hui, c'est plonger dans un style « mou », gras, où un nuage, une maison ou une fleur, peuvent avoir l'apparence d'un chewing gum, avec des yeux, et prendre la parole. Le principal méchant est un bébé très bête, cumulant les mauvaises actions, se déplaçant dans un landau et s'exprimant en « Aglagla bi blouf ». Et l’on peut y croiser Superman, dont on se moque bien, tout comme les édiles et la police, pas bien malignes. Nos deux héros sont plutôt sympas, et si leurs déguisements sont un peu ridicules, ils défendent la veuve et l'orphelin, tout comme une certaine idée de la démocratie. D'ailleurs, un de leur rare ami est un scientifique qui, malgré des erreurs récurrentes, garde une vision humaniste. Au-delà de son style graphique unique, Supermatou génère une liberté, grâce à laquelle nos héros peuvent nous embarquer n'importe où pour n'importe quoi. Il y a bien un début d'histoire d'amour entre le héros et une fan, confectionnant son propre déguisement de « Supermatoute », mais... à part un bisou plus ou moins rêvé, rien ne s'ensuit. Bref, à l'instar d'un Spider-Man, Supermatou évoque les aventures d'un écolier à la conscience politique et écologique très développée. Sans doute la tonalité d'une époque. Quoi qu'il en soit, la série apparaît comme une sorte d'OVNI en 2025, dont cette réédition cartonnée bienvenue offre la possibilité de savourer l'humour toujours utile aujourd'hui.