L'histoire :
En 2005, Mathilde, parisienne de 27 ans, titulaire d’un master en droit international, peine à trouver un poste digne de son niveau universitaire. Elle parle couramment le russe et en profite donc pour donner des cours particuliers… et coucher avec Paul, son ancien prof de droit. Ce dernier lui propose alors de l’accompagner au Kirghizistan, où il doit officier en tant qu’observateur international pour le compte de l’OSCE (Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe). En effet, dans ce pays de l’ex-URSS, doivent se tenir les premières élections présidentielles libres depuis l’indépendance. Mathilde hésite et accepte. Elle sera basée à Naryn, tandis que Paul sera à Bickkek. Elle est fière et ressort son bel appareil photo. Une fois sur place, la jeune femme fait la connaissance avec leur traductrice Nina, mais aussi avec des mœurs très rurales, proches du tiers monde. Aux premiers contacts, elle comprend que l’idée de démocratie est relativement étrangère aux kirghizes. Lors du recensement, certains refusent le tampon d’encre, non pas pour pouvoir voter plusieurs fois, mais parce que c’est laid. Lors d’un petit accident avec un camion, Mathilde se blesse au genou et doit passer par l’hôpital local. Elle y rencontre un médecin étonnant, qui parle français, Azamat… mais qui refuse l’idée d’avoir un bureau de vote au sein de son établissement. En effet, il ne se fait aucune illusion sur l’issue de ces élections…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Tiens, au fait, où en est la démocratie au Kirghizistan ? Comme la plupart des pays, cette république de l’ex-URSS a été soumise en 2005 à la vigilance d’observateurs internationaux, qui se sont exprimés sur la validité de son élection présidentielle. Depuis qu’il n’est plus assistant-réalisateur pour le cinéma (La reine Margot…), Emmanuel Hamon traite de sujets politiques et historiques, au cinéma comme en BD. A travers ce one-shot, sur un dessin de Damien Vidal – réaliste mais peu expressif et distant avec ses personnages – il brosse le portrait d’une observatrice internationale (a priori fictive), dans ce pays rural en voie d’accession à la démocratie. Un bref tour sur Internet vous (re)situera le Kirghizistan, coincé entre le Kazakhstan et la Chine, auquel on ne pense pas tous les jours. L’intention des auteurs n’est toutefois pas de faire un guide touristique de ce coin paumé du monde, mais plutôt de souligner ô combien l’enfer est pavé de bonnes intentions lorsqu’on évoque l’idée de démocratie. L’héroïne part en effet avec de nobles et sincères idéaux : elle va favoriser la démocratie. Et elle en repart écœurée, après avoir été volontairement corrompue, après avoir perdu toute illusion sur son rôle… et pourtant toujours avec les meilleures intentions du monde. La problématique géopolitique est sensible et finement abordée. Elle permet de se rendre compte que la bonne marche de la civilisation est plus que jamais une utopie, une fois qu’on la confronte aux communs et retors arrangements humains.