L'histoire :
C’est en 1949 que tout bascule, lorsque le gamin né en 1926 en Caroline du Nord ose proposer, avant qu’il ne débute son set, ses services au grand Dizzy Gillespie. Le jeune saxophoniste est plutôt doué. Quelques dix années plus tard, il fera d’ailleurs partie du groupe de Miles Davis et arpentera le pays sous les acclamations… C’est peut-être sur les bancs de l’église, où il écoutait chaque dimanche sa mère accompagner à l’orgue les chœurs, que la musique l’a attrapé. Peut-être aussi à cause de la radio jouant à fond Count Basie ou Ellington… Toujours est-il qu’à la mort de son père, c’est-elle qui lui sert d’inséparable compagne lorsqu’il libère, pendant des heures, des notes de son saxo, pour ne plus se sentir abandonné. Le chemin est long qui le mènera, un matin de décembre 1964, dans un studio d’enregistrement du New Jersey pour enregistrer A love supreme, un album dans lequel il tente de s’approcher du divin. Sur la route, il y aura des rencontres : des musiciens évidemment, des femmes bien sûr, l’héroïne et toujours Le Son…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Figure légendaire incontestée et influente du jazz, le saxophoniste John William Coltrane s’offre ici, en biopic, sous le pinceau du jeune auteur italien Paolo Parisi. Le choix qu’opère ce dernier n’est cependant pas celui d’un historien de ce genre musical, mais plutôt celui d’un amoureux touché par l’énergie et le génie innovant du musicien. Ainsi, le « récit » proposé ne s’inscrit dans aucune chronologie, piochant ici où là des instantanés de la vie du jazzman, s’affranchissant d’une quelconque linéarité et jouant de l’aller-retour ou du saut temporel sans complexe. L’articulation choisie calquée sur les 4 mouvements de l’album mythique, enregistré en 1964, A love supreme, emprunte, alors volontairement des chemins narratifs elliptiques. Par petites touches, plutôt qu’en épaississant le récit d’anecdotes, c’est le sens que Coltrane a voulu donner à son art et comment il l’a construit qui est mis en lumière. La démarche proposée est de fait déroutante, peut-être plus facilement accessible aux fans du bonhomme et nécessitant, en tous cas, pour les non initiés, un effort intellectuel particulier. Les premiers se satisferont du rythme narratif ainsi obtenu. Les seconds auraient sans doute préféré qu’un choix plus conventionnel leur permette de mieux connaitre le musicien. Ce que, ni les uns ni les autres, ne pourront reprocher à l’auteur, c’est d’avoir en tout cas réussi à transmettre de l’émotion et donner l’envie, même aux plus hermétiques, d’écouter ce diable de saxo virevolter. La partie graphique remplit quant à elle convenablement sa part de travail, mais sans excès. On regrettera quelques malheureuses disproportions et que le choix bichromique de la couverture n’ait pas été généralisé à l’ensemble de l’album… pour encore plus d’émotion.