L'histoire :
Pat est un papa moderne quarantenaire. Jadis, il était concentré sur sa vie professionnelle et compétiteur dans le sport qu’il pratique, le basket-ball. Mais aujourd’hui, il a pris une année sabbatique pour s’occuper de ses enfants et laisser son épouse Ester s’épanouir dans son poste, qui réclame souvent des déplacements lointains, durant plusieurs jours. Pat est cependant bien décidé à assumer cette condition de père au foyer, bien que les absences d’Ester lui soient de plus en plus lourdes à combler. Les enfants de 3 et 6 ans réclament souvent leur mère, or lui a facilement tendance à perdre patience. Néanmoins, il est hors de question de reproduire le schéma familial qu’il a connu dans son enfance, avec un père violent envers lui et sa mère. Aujourd’hui, les parents de Pat vivent séparés… et son père a sombré dans l’alcoolisme. Pour mieux endurer son propre rôle de père et de mari, Pat ressent le besoin de comprendre les raisons qui ont poussées son père à devenir… un con. Sans doute, faut-il chercher du côté de son passé pendant la guerre du Vietnam ? Un passé que son père refuse d’évoquer et qui redouble son agressivité quand on le questionne. Pat se lance tout de même dans une enquête dévorante au sujet du passé militaire de son père. Or cette démarche se fait au détriment des attentions portées à ses propres enfants…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cette histoire de père au foyer, qui se questionne et nous questionne sur la perte de virilité et la nouvelle époque féministe, nous vient du Canada. L’adaptateur a d’ailleurs laissé pas mal d’expressions typiques de Montréal, qui amusent parfois, mais peuvent aussi brouiller sémantiquement les réactions des personnages (« C’est correct » « Crisse ! Hostie ! Câlisse ! »). Le personnage de Pat veut assumer sa modernité et jouer un rôle d’homme au foyer qui assume. Mais en est-il capable, étant donné le passé familial ? Biologiquement, un père peut-il transmettre par hérédité son incompétence domestique et son tempérament violent ? L’anti-héros imaginé par le scénariste Mark McGuire ne voit qu’une issue à la problématique lourde qui se dresse devant lui : enquêter sur son propre père, sur les origines de sa violence, de son alcoolisme, les exactions qu’il a dû commettre durant la guerre du Vietnam et qui ont causé un SSPT (Syndrome de Stress Post Traumatique) définitif, afin d’exorciser ce qu’il est persuadé de reproduire… et ce qu’il reproduit effectivement, tant cette quête devient obsessionnelle. Cette intériorisation est très intéressante et en dit long à la fois sur la transition sociale en cours de notre époque, et sur les SSPT issus des guerres. Bien qu’expressif et adapté au propos, le dessin produit par Alain Chevarier est minimaliste et se contente tout au long des 16 chapitres (264 pages) de cette longue chronique sociale contemporaine d’un rough crayonné à peine amélioré.
