L'histoire :
Yvon Le Gern est encore touché par le deuil. Après avoir perdu sa femme Soizig suite à une deuxième fausse couche, c'est désormais sa fille qui s'est éteinte. L'enterrement est difficile et la pluie redouble d'intensité mais Yvon se refuse à pleurer. Comment le pourrait-il ? Son père l'a suffisamment battu pour lui enseigner qu'un homme ne pleure jamais. Il est d'ailleurs responsable de la mort de celles qu'il aimait le plus. Sa femme est morte dans la honte, car elle avait peur de montrer son deuxième échec. Elle s'est donc cachée dans la grange pour quitter la vie. Ce fut ensuite une lente descente aux enfers. Incapable de s'occuper de son enfant et ne supportant pas son regard qui reflétait l'incompréhension, Yvon a fui sa propre fille en s'enfermant dans le travail et en s'éloignant dès qu'il en avait l'occasion. Il a donc laissé Haude s'occuper de sa fille. Mais un jour qu'il était sur un bateau, elle est morte suite à une mauvaise toux. Perdu et se sentant seul, Yvon marche désormais seul dans la forêt, contenant sa rage et son envie de pleurer. Il arrive devant cet immense hêtre au centre d'une clairière. Le regard vague, il finit par apercevoir de très nombreux petits personnages étranges, à la peau très blanche et affublés d'un masque. Ces créatures lui parlent et lui proposent un incroyable marché : s'il ramène de la mie de pain et des cheveux de sa fille, ils la feront revenir à la vie !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La série Brocéliande emprunte des chemins inédits et s'étire sans arrêt en longueur, à l'image de la fameuse forêt bretonne éponyme. Ce tome 7 va en surprendre plus d'un, comme un voyageur découvrirait une lisière abandonnée et inexplorée. Cet album détone en effet par rapport aux autres de la série. Tout d'abord, le fameux petit peuple magique n'a pas de nom ni de visage et garde son mystère jusqu'au bout. Le ton est également bien plus différent ici. En effet, Nicolas Jarry aborde des thématiques dures et tristes comme la solitude, la culpabilité, l'alcoolisme, la folie... Bien plus sombre que les tomes précédents, l'opus démarre sur le deuil et la mort sera le fil conducteur de l'album. La voix off d'Yvon renforce encore ce sentiment de désespoir et plonge au cœur d'une âme tourmentée. La justesse des sentiments aboutit à des scènes parfois déchirantes. La question du lien paternel et de l'engagement dans la vie de famille trouvera des échos en chacun d'entre nous. Les textes sont simples, mais d'une beauté sans nom. Ce conte doux-amer est beau également par le dessin de François Gomes. Le dessinateur, qui avait déjà travaillé sur le tome 5, allie parfaitement la grandiloquence de la forêt à la simplicité ronde et vivante d'un visage. Ce tome foncièrement différent constitue une parenthèse enchantée, forte et émouvante dans la série Brocéliande.
