L'histoire :
Une petite alsacienne en tenue traditionnelle pleure au bord d’un chemin. Elle est semble-t-il perdue. Elle se fait aborder par une créature inquiétante ayant une forme d’épouvantail. C’est Hans Trapp, le père Fouettard local, qui lui prodigue quelques conseils sous forme d’histoires :
Le moulin du diable : Les paysans en ont assez que le meunier les extorque pour moudre leur blé en farine. Ils demandent au vieil ermite d’intercéder en leur faveur. Celui-ci n’aura d’autre choix que d’effrayer le bougre, en se déguisant en diable. A moins que ce ne soit pas vraiment lui…
La légende de l’horloge : Un horloger orgueilleux déprime que les autorités n’aient toujours pas fait appel à son talent, qu’il considère immense. Le veilleur de la cathédrale lui propose alors un plan pour construire la plus belle horloge de France…
La rose d’argent : Dans leur royaume souterrain, le peuple nain s’inquiète de la civilisation humaine qui va grandissante et empiète sur leur territoire. Faut-il fermer le passage entre leurs mondes ? Tandis qu’il réfléchit à ces questions, le roi nain surprend une belle humaine se baignant dans un étang. Il en tombe profondément amoureux. Hélas, ce ne sera pas réciproque…
La légende du bailli et de son secrétaire : Le bailli et son secrétaire, qui rendent les jugements sur les menus larcins de la contrée, se penchent sur le cas d’un bohémien qui a volé de la nourriture. Celui-ci négocie sa grâce en échange d’un médaillon qui permet de prendre forme animale. Le magistrat accepte et testera, à son grand dam, la métamorphose en cigogne…
Les pierres de Lachtelweiher : Un jeune berge est jaloux de la fortune exhibée par un voyageur italien régulièrement de passage. Il l’espionne jusqu’à un lac, d’où l’étranger récupère curieusement des pierres. Mais il se fait surprendre et assommé. Il se réveille dans une riche demeure de Venise où l’homme lui explique qu’il est alchimiste. Il lui explique que selon un procédé chimique secret, il parvient à transformer les pierres du lac en or…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les scénaristes Fabrice David et Grégory Lassablière inaugurent avec l’Alsace et la Provence, sortis de conserve, une nouvelle collection de recueils consacrés aux contes et légendes traditionnels de nos régions. Les clés du dessin ont été confiées à une poignée de jeunes artistes, qui livrent chacun une partition sérieuse et appliquée, quoique très académique. Sans doute faut-il imputer ce manque de personnalité à la nécessité de nivellement, afin que les cinq historiettes et leurs transitions montrent une certaine cohérence narrative, à défaut d’être semblables sur le plan visuel. Les historiettes appartiennent à divers registres : plutôt historiques avec l’histoire de l’horloger (dessinée par Ludovic Ouali) ; féeriques avec celle du roi nain (dessinée par Christian Hojgaard) ; fantastique avec le bailli transformé en cigogne (dessinée par Jean-Marie Minguez) ; ou entre les deux avec les légendes du meunier (dessinée par Vincenzo Acunzo) et de l’alchimiste (dessinée par Flippo Cenni). Les séquences en interlude, montrant l’épouvantail Hans Trapp et la petite alsacienne en tenue traditionnelle, assurées par Odd Serrière, servent quant à eux vraiment de bouche-trou, sans grand intérêt narratif. Une page annexe revient enfin rapidement sur l’origine ou les intentions de ces légendes. L’alsace en tant qu’« entité » régionale a une forte personnalité (tout comme la Provence… ou la Bretagne). On peut toutefois s’interroger sur le potentiel d’autres régions, dont le découpage a souvent été dicté par des contingences administratives, à réunir des légendes locales typiques. Les auteurs auront-ils matière à mettre en exergue équitablement les 20 régions restantes ? La carte de France en fin d’album en fixe en tout cas l’ambition…