L'histoire :
Perkis Sambatan est un Français moyen qui vit seul dans son petit appartement sur Paris. Il fait souvent grise mine et beaucoup lui reprochent sa tristesse. Mais c’est plus fort que lui : travailler dans les sous-sols et souterrains n’aide pas à garder le sourire. En effet, Perkis est chauffeur de métro sur la ligne 12. Ce ne sont pas les informations télévisées qui vont lui remonter le moral. Tous les jours, c’est la même rengaine : épidémies, catastrophes naturelles, attentats, sermons religieux pour ne pas perdre la foi. Le monde va mal et souffre dans l’indifférence générale. Un soir comme les autres, Perkis conduit sa rame... mais un incident survient : une femme se jette sous ses roues, devant ses yeux. Il ne peut éviter la catastrophe. Une psychiatre vient réconforter le conducteur et lui explique les symptômes qui vont suivre. Perkis doit s’accorder du repos pendant deux semaines, prendre un traitement et accepter un suivi psychologique. Les cauchemars le hantent et une question reste en suspens : pourquoi cet incident lui est-il arrivé, à lui ? Pourquoi à cet endroit et à ce moment précis ? Perkis a besoin d’en savoir plus sur la femme qui s’est suicidée. Il apprend qu’elle était enceinte. Ce terrible événement ne cache-t-il pas une réalité bien plus terrible encore ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans la Bible, « Le fils de la perdition » est l’Antéchrist, celui qui viendra sur Terre pour annoncer tous les malheurs et provoquer la fin du monde. Le double inversé et maléfique du Christ. Cette histoire célèbre décrite dans l’Apocalypse selon Saint Jean a donné lieu à de nombreuses fictions. Qui d’autre pouvait s'en inspirer en bandes dessinées que Christophe Bec, le dessinateur du ténébreux Sanctuaire ? Comme beaucoup de films sur le thème du Diable, l’histoire commence de façon extrêmement réaliste. On suit la vie quotidienne calme et insipide de Perkis, un morne métro-métro-dodo parfaitement représenté. La solitude du personnage qui s'endort devant les infos télévisées est également caractéristique. L’intrigue démarre sur un événement devenu presque banal : un « incident de voyageur », c'est à dire le suicide d’un usager dans une station de métro. Dès lors l’histoire plonge petit à petit dans le fantastique et l’ésotérique. La force du récit est de laisser planer le doute jusqu’au bout : Perkis est assailli par le remord. Est-il vraiment objectif quand il découvre la vie de la victime morte dans le métro ? Assommé par les médicaments, n’a-t-il pas lui-même sombré dans la folie et la paranoïa mystique ? Le diable est-il vraiment parmi nous ? Avec force et intelligence, Bec multiplie les voies narratives, comme si Perkis était régulièrement harcelé par tout ce qu’il entend autour de lui. On a ainsi une peinture impressionnante d’un profil psychologique instable constamment persécuté par des voies intérieures contradictoires. Le reste est assez classique, avec cette angoisse de l’avènement de l’Antéchrist. Bec n’a pas son pareil pour faire monter le suspens et dépeint fort bien cette angoisse sourde et mystique. On a également une peinture cynique de notre société actuelle qui, attaquée de toutes parts par les événements du monde, se tourne vers des discours métaphysiques et spirituels. Les encrages d’Andrea Mutti, plus sombres que jamais, tendent vers le style de Bec dans Sanctuaire. Accompagné par cette ambiance noire et envoûtante, on plonge lentement dans une véritable descente aux enfers. Un one-shot diabolique...