L'histoire :
Charlotte, Darius et Louis sont trois jeunes gens malades de vivre. Entre les séances de psychanalyse, les enterrements de leurs aïeuls et leur groupe de rock, ils se retrouvent souvent sur le banc d’un square pour deviser sur le non-sens de leur morne existence. Petit florilège de leurs réflexions : « Le seul moyen de ne plus être préoccupé par l’existence, c’est de mourir ». « J’aime les vieux. On a l’impression qu’ils sont sages… mais dans leurs yeux, on sent l’immense détresse d’avoir vécu et de n’avoir rien compris ». « Si le temps passe vite, cela nous rapproche du néant. S’il passe lentement, nous nous ennuyons et rien n’a d’intérêt ». « Si on couche ensemble, mon orgasme aura un arrière-goût de dommages et intérêts ». « Vieillir, ça veut dire avoir les doigts trop gros pour pouvoir les mettre dans une prise électrique ». « Croire en Dieu est une forme d’hypocondrie positive ». « L’inconvénient d’une psychanalyse, c’est qu’il vaut bien vivre entre les séances pour avoir quelque chose à raconter ». « Devenir adulte, c’est ne s’occuper que de ce qui est sérieux et oublier tout ce qui est important ». Louis au guichet d’une banque : « Je vivrai ma jeunesse plus tard, en attendant, je voudrai la mettre sur un compte épargne ». Louis chez le médecin : « Pour vraiment apprécier mes vacances, il faudrait que vous me les prescriviez. »
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce petit bouquin souple (ré)édité par les éditions Vraoum se compose de plus de 200 strips absolument pas drôles… c’est même tout le contraire qui est véhiculée par le propos du scénariste Martin Page. Car les trois protagonistes mis en scène dans la pure tradition des strips horizontaux de 1 à 4 cases, façon Schult, Quino ou Watterson, se retrouvent systématiquement à émettre des réflexions profondément pessimistes – mais néanmoins pleines de bon sens et de truculence – sur leur existence. Ils causent de leurs déboires amoureux (que leur mentalité défaitiste provoque), partagent leur amertume de cette vie qu’ils subissent comme un fardeau, ou portent un regard atrabilaire sur la superficialité inconsciente de leurs pairs. En bref, ils pèchent par excès de lucidité, tant et si bien qu’ils ne soulignent que le verre à moitié vide. Ils ne sont pas révoltés, mais se considèrent comme inadaptés à la société, en marge, sur la touche. Et comme ils se retrouvent souvent sur un banc public d’un square, le titre était tout trouvé et n’a que peu à voir avec la métaphore sportive. Synthétique et adapté au registre de la blogosphère, le dessin de Clément Fabre se compose de quelques traits stylisés et sensible, dans un décorum la plupart du temps minimaliste. Toutes ces réflexions se montrent assez subtiles et donnent souvent à réfléchir. Reste qu’on vous conseille de les lire à toutes petites doses, sous peine de vous pendre avant d’en avoir achevé la lecture…