L'histoire :
Aux actualités, il fait la Une : l’homme artificiel, la huitième merveille du monde, marquant le début d’une nouvelle ère, atomique, création du professeur Erich Cloud de San Fransisco. Non loin, sur une plage déserte, une jeune serveuse rencontre à la nuit tombée un homme poisson, l’homme de l’Atlantide, connu des services de l’armée pour avoir perforé la coque en acier trempé d’un cuirassé, à mains nues. En Europe, sur le front, le célèbre Fier Américain, icône vivante d’une nation triomphante, reçoit l’ordre de rentrer au pays en urgence. Au pays justement, Johnny Zip est devenu LA star du septième art grâce à une vitesse de course extraordinaire, cette même faculté pour laquelle il doit aujourd’hui répondre à l’appel de l’oncle Sam. Enfin, Churchill, premier ministre d’une Angleterre esseulée, a choisi de missionner le célèbre agent britannique Douze Coups auprès de son allié d’outre atlantique. C’est ainsi que devant le Capitole, le gouvernement fédéral jubile en présentant aux médias du monde entier, sa nouvelle ligne de défense, la « garde rapprochée ». Un team de rêve dont l’entente est pourtant loin d’être acquise et dont la première mission contre l’Allemagne nazie se révèle un fiasco : l’homme artificiel a en effet transformé en torche humaine l’ensemble de ses adversaires…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les comics se caractérisent, entre autre, par l’étroite relation qu’ils entretiennent avec l’Histoire. L’élément fantastique, généralement le(s) super(s) héros, viennent se greffer sur une réalité quotidienne dont ils subliment l’ordinaire, originellement pour le meilleur, parfois le pire… (depuis notamment les Watchmen d’Alan Moore). Nés durant l’entre-deux guerres, alors que la Grande dépression (et accessoirement la menace nazi) plombait le moral du pays, les auteurs américains inventent une littérature illustrée, d’un manichéisme biblique, autour de personnages récurrents dotés de pouvoirs extraordinaires. BattleHymn prend sciemment le contre-pied du genre tout en en respectant les codes. Si la mission reste la même (sauver l’Amérique, et par la même occasion le monde), sa réussite paraît bien compromise à l’issue d’un premier tome où l’égoïsme des soldats appelés Sous les drapeaux n’a d’égal que le cynisme de ceux qui les emploient. Clay Moore (heureux patronyme du genre !) et Jeremy Haun dressent de l’ « âge d’or » un tableau sombre, très critique. Toutes les planches (ou presque) sont à dominante noir, grise foncée au mieux, comme embrumées, engluées dans un marasme ambiant. Le trait sobre et réaliste est un classique du genre, faisant la part belle aux personnages et à un découpage cinématographique de l’action. La couverture très réussie s’apprécie à la lecture terminée d’un tout autre regard, un regard noir. Après tout, si elle ne put créer l’homme artificiel, la science, quintessence du progrès de l’humanité, n’est-elle pas avant tout responsable de l’apocalypse nucléaire ?