L'histoire :
1981, à Miami. Deux hommes se retrouvent dans un bar. Le premier a contacté le second pour exécuter un contrat avec beaucoup, beaucoup d'argent à la clé. Les termes de la proposition sont clairs : un des plus riches magnat de l'industrie de la high-tech a construit une machine qui n'aurait jamais dû exister. Elle se trouve dans sa maison, située au nord de la ville. Réussir à la voler, c'est ce qui permettra au type qui va accepter de ne plus jamais avoir à compter son argent. Il se rend donc sur place, la nuit tombée, et s'introduit dans une somptueuse demeure, plongée dans une obscurité interrompue par les lueurs de la foudre qui tombe... Le voleur parcourt les couloirs immenses et les vastes pièces. Il met du temps à trouver le cœur de la machine, sans comprendre qu'il se situe désormais en face de son œil. Soudain, l'espace s'éclaire et le propriétaire apparaît. Il s'excuse de la souffrance que va connaître l'homme à qui il fait face et qui ne comprend pas encore qu'il a été piégé. Car la machine se déclenche et prend sa cible dans un faisceau d'ondes et de lumière. L'homme n'arrive pas à se relever, il est encore groggy mais il aperçoit un double fantomatique de sa personne. C'est alors que le propriétaire de la maison lui fracasse le crâne à coups de marteau...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cela fait un moment que les fans de comics connaissent James Tynion IV mais depuis The Nice House on the Lake, il y a fort à parier que le lectorat du scénariste va s'installer au delà des fans de super-héros. C'est donc avec une nouvelle own story qu'on le retrouve à travers l'éditeur US, DSTLRY, dont l'ambition est de laisser certes les mains libres aux auteurs, mais aussi d'en faire les coproducteurs de leurs œuvres. Et si l'excellent titre précédemment cité était tombé dans l'escarcelle de Urban Comics, c'est Delcourt qui a acheté les droits de ce nouvel éditeur américain et qui offre à Spectregraph une très belle édition Hors-Collection, avec un format notablement plus grand que celui des comics classiques. Et ce qu'on peut vous dire, c'est que l'album nous a captivé. Le scénariste nous refait le coup du huis clos et il utilise aussi le décor comme un personnage à part entière, un peu comme dans The Nice [...], d'ailleurs. En effet, il est question d'une maison à vendre et qui va devenir le théâtre de tous les évènements. Le truc, c'est qu'elle contient une machine destinée à capter l'âme humaine pour permettre la vie éternelle. C'est une affaire de bons et beaux sentiments, car son concepteur n'y voit d’intérêt que pour vivre éternellement l'amour qui le lie à son compagnon. Hélas, on le sait tous, le chemin vers l'Enfer est pavé de bonnes intentions. Et c'est ainsi qu'une fille mandatée pour vendre la maison et une acheteuse potentielle se retrouvent enfermées, c'est à dire piégées et confrontées à la folie de ce multimillionnaire... James Tynion revisite ainsi le mythe de l'apprenti sorcier et les protagonistes féminins du récit proposent un contrepoint hyper intéressant, qui souligne le sens qu'on donne à nos vies. Côté dessins, c'est Christian Ward qui assure le job, avec maestria. Si l'album est captivant, c'est que ses peintures digitales lui donnent corps de façon incroyable, à l'image du travail qu'il effectue sur les couleurs. Voilà, Spectregraph vous embarque en plein mystère et délivre une grande tension. Il plonge le lecteur dans une intrigue des plus sombres et rend aussi hommage de façon très originale à la mythologie des maisons hantées. Il fait partie de ses albums qu'on n'oublie plus jamais, une fois qu'on les a lus. Un album éternel ? C'est à vous désormais qu'il revient de lui attribuer cette qualité...
