L'histoire :
Dans un avenir pas si lointain… L’incapacité humaine à enrayer le réchauffement climatique, la surconsommation, la pollution planétaire, amena les politiciens de la Terre à se livrer à une guerre mondiale très sale. Les religions furent désignées (entre autre) responsables des mentalités radicales. On fit alors appel à la science. Car des savants avaient réussi à isoler la partie du cerveau qui croyait en Dieu. Il suffisait dès lors de faire massivement décroître cette zone pour assagir l’humanité. Un produit fut mis au point, le DVO-8, puis inoculé par bombardement sur une base de fondamentalistes religieux, à titre expérimental. Hélas, ce produit était non seulement extrêmement contagieux, mais le facteur régressif s’attaquait à un peu plus que la « zone religieuse » du cerveau. Les créatures de toutes espèces se sont alors mises à régresser, dans le sens inverse de l’évolution intellectuelle, en un phénomène qu’on a appelé « la dévolution ». En moins d’un an, tout ce que la Terre pouvait compter de vivant – hommes, animaux et végétaux – a ainsi sévèrement dévolué. Dans ce contexte, quelques quartiers sécurisés ont moins dévolué que d’autres et comptent bien maintenir leur organisation sociale à un stade légèrement brutal – mais non sauvage. Et un jour, l’une de ces bases, dirigée d’une poigne de fer par le néo-nazi Gil, est visitée par Raja, une jeune femme qui est mystérieusement restée 100% sapiens. Elle annonce qu’elle a besoin d’eau et de vivres, et qu’elle est porteuse d’un antidote à la dévolution, qu’elle doit mener à San Francisco. Or tout cela est un peu trop compliqué pour le bourrin Gil…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Savez-vous ce qu’est une « Dévolution » ? Pas compliqué : c’est le contraire d’une évolution, au sens darwinien du terme. C’est-à-dire la régression intellectuelle et sociale de l’humanité, qui ramène certains individus à un stade de sauvagerie préhistorique. L’idée de départ imaginée par le scénariste Rick Remender nous place tout d’abord face à notre problématique du moment : l’humanité surconsomme, se livre à des rivalités économiques, se fait la guerre et pollue son environnement… Bref, elle est incapable de s’empêcher de ravager son équilibre de vie. C’est alors que politiciens et savants imaginent une solution et font une grosse bêtise. Ils balancent un virus ultra contagieux pour faire régresser la zone de cerveau liée à la religion – donc à la radicalisation. Or ce faisant, c’est tout le vivant de la planète qui régresse… sauf l’héroïne, qui a été immunisée par son paternel, le savant à l’origine de cette apocalypse. Tout cela est expliqué dans les premières planches, jouissives dans leur dimension misanthropique. Cette mise en bouche fait sens et alerte sur l’urgence de modifier nos modes de vie. Tout le reste de l’album, c’est-à-dire le recueil des 5 fascicules parus aux States (série complète, soit 176 pages), montre alors la difficulté pour cette héroïne de réaliser la mission qu’elle s’est fixée pour disséminer un antidote, étant donné qu’elle manœuvre dans un milieu bourrin extrême. De fait, les nombreuses scènes d’action ne sont pas finaudes : ça charcle, ça gicle, ça hachouille et ça broie. Il y a des monstres géants (requins, araignées), des facilités dans les rebondissements, des répliques de bourrins à prendre au second degré et même des gens venus de l’espace ! (et ouais !). Au dessin semi-réaliste soigné et noir, Jonathan Wayshak s’en donne à cœur joie avec les tronches patibulaires en macro-plans, les ruines rattrapées par une végétation devenue folle et les situations d’action exacerbées.