L'histoire :
C’est un temps à ne pas mettre un pied dehors. Tempête, pluie battante, orage grondant… un vrai bordel dans le ciel. Il ne fait pas plus beau dans sa tête et ça pétarade dans tous les sens alors qu’il fonce comme s’il allait avaler la route. Wallace repense à ses derniers instants avec Purvis. Il savait que son client était vraiment un con mais là, ça dépasse les bornes. Il lui a amené un tableau qu’il a réalisé à partir de la femme soit disant mannequin. Comme il s’y attendait, Purvis ne comprend pas : pas assez nue, pas assez sexy, pas assez vulgaire. Seul le cul fait vendre. Alors, il avait prévu le coup avec un autre tableau qui répond à ce qu’il veut. Et le pire, c’est que cette croute infâme lui a demandé beaucoup moins de temps que celle qu’il refuse. Et là, il ne sait pas ce qui lui est passé par la tête mais il avait trop envie de le faire. Devant les yeux médusés du gros Purvis, il déchire la toile! Contrat terminé : le début de la galère. La liberté a toujours un prix. Alors qu’il continue à rouler vite, il voit une femme se détacher de la lune, sur le sommet de la falaise. Sublime créature, déesse descendue du ciel… Il la regarde, médusé. Elle s’avance et elle saute dans le vide…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La saga Sin City s’arrête sur ce tome 7 et le dernier volume réédité par Huginn & Muninn est bien plus épais et volumineux que les autres. Il faut dire que cet Aller et retour pour l’enfer est peut-être la somme de tout ce qu’a réalisé Frank Miller dans ce polar révolutionnaire. On y retrouve toutes les ficelles qui ont fait le succès de cette œuvre à part : un héros glacial et vengeur façon Jésus Christ, des femmes fatales et vénéneuses, une police corrompue et une organisation criminelle dangereuse. Le noir est de mise puisque ce qui se cache derrière la mafia est bien plus sombre et glauque que tout ce qu’on avait lu auparavant dans les autres tomes (pourtant déjà bien sordides), comme si on plongeait dans les entrailles de l’enfer. Miller nous montre à quel point il maîtrise la narration avec des textes qui alternent littérature et langage grossier. Plusieurs saynètes déstabilisent par leur originalité à l’image de l’aparté de Josh qui prend son premier râteau, cassant le fil de l’histoire pour mieux le retrouver ensuite. C’est le cas, bien sûr, de cet exercice de style remarquable où Wallace est victime d’hallucinations et où l’on plonge dans un univers totalement dingue. Un numéro de virtuosité d’autant plus folle que Miller s’amuse à coloriser tout le passage et fait de multiples références à l’art, au comics et à ses propres œuvres. Tout est parfaitement calibré, comme un bon magnum chargé, et le dernier tome n’a pas manqué sa cible loin s’en faut. L’artiste, qui ne va décidément jamais là où l’on attend, s’essaie en plus à l’humour mais un humour à sa façon : dur et caustique. Son trait devient parfois caricatural, grotesque mais il faut le reconnaître parfois aussi plus facile et moins marquant. On quitte Sin City avec regret car cette ville aura beau être pourrie jusqu’à la moelle, elle aura donné parmi les plus belles pages des comics.