L'histoire :
Il fallait au moins ça pour le réveiller. Cette douleur énorme et effroyable dans la poitrine. Il lui faut un peu de temps pour émerger et quand il se redresse enfin, il se rend compte du joyeux bordel qu’il y a autour de lui : deux bagnoles complètement déglinguées et un cadavre qui se vide de son sang. C’est pas joli joli mais c’est pas le pire dans tout ça. Le pire, c’est que Marv ne se rappelle de rien. Il est pas même fichu de se souvenir de tout ce cirque qu’il y a autour de lui. Ok il est pas habitué à ce que ça parte en live quand il s’y met mais là c’est le trou noir. Une clope, une pause et on réfléchit. Le but du jeu est de tirer le fil pour arriver à savoir ce qu’il a foutu pour en arriver là, dans ce tronçon de route abandonnée et avec tous ces dégâts un peu partout. Déjà, il arrive à retrouver le jour actuel. C’est samedi et qui dit samedi dit Nancy. Comme d’habitude, il a passé la soirée à la reluquer, lui pauvre misérable vagabond pathétique qui observe, les yeux écarquillés, un véritable ange sur terre. Après, ça a mal tourné. Ça a commencé quand ce mec a pris sa Nancy par la taille et l’a embrassée. Désespoir, amertume, solitude. Dans ces cas là, plus qu’une solution : une bière. Seul l’alcool permet de noyer son chagrin. Ça a continué avec cette odeur de brûlé caractéristique. Celle de la chair qui a pris cher ! Il est sorti et il a vu…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
La réédition de la série mythique Sin City chez Huginn & Muninn en est déjà à son tome six. Si la pagination et le format restent le même ici, le contenu change néanmoins. En effet, Frank Miller s’essaie aux récits courts, voire ultra courts, tout en gardant l’univers poisseux de sa série noire. Plusieurs nouvelles sont donc proposées, d’une cruauté sans nom avec des chutes sombres qui traduisent le monde déjanté vu par Miller. On pourrait même crier à la misogynie tant chaque saynète montre la dangerosité des femmes qui séduisent pour mieux tromper/ manipuler/ assassiner/ les pauvres imbéciles qui tombent sous leur charme. Heureusement, la dernière histoire nous fait croire que Mary est une vénéneuse tentatrice alors que la fin montre tout le contraire. C’est d’ailleurs l’un des principaux attraits de ces récits courts. Chacun fonctionne comme un piège pour le lecteur qui ne pourra qu’être surpris et choqué par la chute. A ce titre, Le client a toujours raison est un pur chef d’œuvre. D’autres sont plus brut avec la fascination de la loi du talion cher à l’auteur. L’arme fatale de Miller, c’est véritablement son dessin. Il se surpasse encore dans la maîtrise du noir et blanc (si tant est qu’il pouvait faire mieux par rapport aux tomes précédents) et ses cadrages audacieux et il y ajoute une nouvelle touche avec un détail coloré, généralement lié aux femmes fatales, dont la vivacité tranche autant qu’une longue traînée de sang sur la peau. Frank Miller réinvente le polar et on en redemande.