L'histoire :
John Caïn est inspecteur à la crim'. C'est un bon flic : il mange flic, respire flic, fume flic, chie flic, dort flic. D'ailleurs son équipier le réveille, John a piqué du nez dans la voiture. Multiples coups de feu signalés. Deux collègues ont barré le secteur. Caïn et Amersham sont les premiers sur les lieux. Le temps de se faire confirmer qu'il n'y a ni témoin, ni activité repérée depuis le signalement d'une grosse fusillade et les voilà devant la porte d'un hangar sous laquelle s'échappe une bonne quantité de sang. Les deux officiers procèdent à l'ouverture du volet déroulant. Et ils assistent à une scène d'horreur. Une dizaine de femmes ont été tuées par balles. Ce hangar est point de deal. Il y a de la poudre partout et des faux passeports en pagaille. Caïn et Amersham vont tout de suite rencarder les stups, cette affaire n'est pas pour eux. Ils supposent que les victimes venaient faire le deal et ramasser le fric, mais qu'elles se sont faites doubler par un gang rival qui a eu vent du rencard. Le pire, ce sont les restes calcinés de bébés. Aucune chance qu'ils aient été en vie au moment de ce carnage : ces femmes qui étaient des mules passent la drogue dans des cadavres de bébés. Un nourrisson tout calme, dont on fait semblant de s’occuper pendant un vol, ça n'attire pas l'attention...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dire que Warren Ellis n'est pas n'importe qui est un doux euphémisme. On ne vous fera donc pas le coup de la bio' en quatre lignes, ni même quatre colonnes, car ni vous ni lui ne méritent qu'on le réduise à quelques lignes. Ce n'est pourtant pas dans le polar qu'il a fait sa réputation mondiale. Ce registre de ses créations est un peu moins connu, du moins par le grand public. Certes Red a été adapté au cinéma (alors que c'est peut être son œuvre la plus faible), certes il a aussi adapté quelques tomes du comics James Bond, certes il a également écrit des romans policiers, mais l'ombre des géniaux Transmet' et Planetary ainsi que des récits super-héroïques, de Marvel à Black Summer, lui colle à la peau. En matière de polar donc, on avait aussi eu droit à Down (bof) et Fell (le panard). Komics Initiative est allé fouiller du côté des inédits en France et après deux parutions costaudes, Apparat et Bad world + Do anything, revoici donc une bonne pioche avec ce Scars, dont la campagne Ulule s'accompagne de la partion d'un autre volume qui recueille deux histoires (Dark Blue + Atmospherics). Avec une enquête qui pue le sordide, Ellis délivre 180 pages prenantes, mais somme toute assez classiques. La violence est omniprésente, avec un personnage principal qui est l'archétype du flic détruit mais qui s'accroche à son job pour pas se foutre en l'air. Le rythme est assez lent mais il est idéal pour plomber l'ambiance. Jacen Burrows fait ce qu'il sait bien faire : dessiner sans chichi ni fioriture, alors que son noir et blanc est enrichi des nuances de gris qu'amène Nimbus. Alors on finit ce one-shot qui se lit comme on s'enfile une bonne dose d'un whisky brut et raffiné à la fois : bien secoué. Et il reste la postface du scénariste pour connaître les coulisses de ses pensées, ses expériences, ses observations, et le message qu'il veut transmettre aux lecteurs, à travers cette histoire finalement plutôt classique, mais sacrément bien ficelée.
