L'histoire :
Triste journée que celle-ci. Il y a parfois des jours où tout semble s'arrêter, ou au contraire s’accélérer. Le jour où Griffin Silver, artiste et frère de Brad, mourrait, Francine apprenait que ce dernier la trompait, fracassant ses dernières illusions sur son mariage. Ce même jour, la femme de Griffin, Nikki, faisait une fausse couche et perdait leur bébé. Oui, un jour comme celui-là marquait un point de non retour. Sur le ferry qui les ramenait en Amérique (ainsi que les cendres du défunt musicien), Francine prit sa décision : elle allait quitter Brad, divorcer et retrouver Katchoo qu'elle n'aurait jamais du laisser. Mais arriveraient-elles à retrouver la joie et l'insouciance de leurs vingt ans ? Car au même moment, à des lieux de là, David se mourrait. A ses côtés, Casey et Katchoo le veillaient et espéraient de lui un enfant comme pour conjurer le sort. Un autre de ces jours où rien après ne sera plus comme avant se profilait. Et rien ne disait que les retrouvailles des deux amantes séparées depuis si longtemps étaient écrites...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
On l'attendait depuis longtemps. Voila en effet 18 tomes (et un hors-série) qu'a débuté cette réédition française de Strangers in Paradise. Et il serait mentir que de dire que le dénouement d'une intrigue fleuve si riche en rebondissements en tout genre – tous les qualificatifs peuvent y passer : sentimentaux, mafieux, sexuels, géographiques, historiques, tragiques ou non, etc. – n'était pas désiré ardemment. Si certains jugeront que la sauce avait, en un sens, assez tourné, d'autres leur répondront qu'il était effectivement temps, mais que ce temps n'est venu que maintenant. Adroite et pleine de maturité, la conclusion proposée par Terry Moore s'inscrit dans la lignée d une série qui a su mûrir avec le temps, tout en préservant le côté théâtral qui fit et fait son charme. Les personnages ont tous bien évolué et parcouru leur bonhomme de chemin, même si certains mieux que d'autres... L'auteur en tout cas semble n'en oublier aucun, le dernier acte d'une pièce étant toujours l'occasion d'explications nourries. Happy end ou pas ? L'occasion leur est donnée d'endosser une dernière fois des rôles à la fois emprunts d'humour, de gravité et de recul. Tout au long de ses presque 200 pages, le lecteur apprendra que l’écriture de cette histoire ne devait rien au hasard. Construite comme un long flashback illustré, entrecoupé d'entractes musicaux et de digressions littéraires, l'œuvre pourra s'enorgueillir d'avoir marqué son temps. Inscrite pleinement dans son époque, les thématiques évoquées rassembleront pour longtemps toute une génération, un peu a la manière d'une série télévisée telle Friends. Naturellement le plus abouti graphiquement, ce volume l'est aussi dans sa composition. On ne saurait trop conseiller aux plus chanceux et fans d'entre vous de se procurer l'édition augmentée de bonus récréatifs inédits. Sa couverture est belle, réflexive et symbolique et vous mettra sur la voie de la tonalité conclusive d'ensemble. En écho à la claque des débuts, c'est avec plus de retenue que se termine ce mélo tragi-comique, la boucle « heureusement » bouclée. Et puisque l'envie nous prend de parcourir à nouveau l'ensemble des démêlés de Francine, Katchoo et de leurs amis, c'est sûrement que la jouissance y était et est encore. Pour sûr, vue la richesse du titre, il est possible de redécouvrir des détails ratés. Mais quel pied !