L'histoire :
Holden Carver revient de loin. John Lynch, son supérieur hiérarchique qui l’a chargé d’infiltrer une organisation terroriste contrôlée par Tao, un des post-humains les plus dangereux du monde, est sorti du coma provoqué par une balle de 38. Durant quatre ans, ce Sleeper (agent dormant) a agi sans que personne ne puisse rien faire pour lui. Pire : aux yeux du gouvernement c’est un renégat passé de l’autre côté. Plongé en pleine paranoïa, il finit même par être démasqué par Tao, qui voit en lui un tueur exceptionnel qu’il veut retourner contre Lynch. Il existe en effet une haine entre le terroriste doté de pouvoirs psys et le boss de l’agence gouvernementale. Une haine révélatrice d’une histoire commune. Carver va en découvrir la teneur, et son seul espoir, désormais, est de jouer un double-jeu pour sauver sa peau. N’acceptant plus d’être manipulé par les deux camps, il va appliquer ses propres règles, avec le soutien de Miss Misery, proche collaboratrice de Tao dont il est tombé amoureux…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Suite et fin de cette série au succès critique et commercial aux USA (nominations aux Eisner Awards), non sans raison. Rappelons qu’Ed Brubaker a décroché cette année le prix du meilleur scénariste (Incognito, Criminal, Captain America, Gotham Central) et que sa collaboration avec Sean Philips renvoie aussi aux deux premières séries citées. L’histoire proposée est complexe et désespérément sombre. Même si l’intrigue est construite en tiroirs, la narration qui s’appuie sur la voix-off permet de suivre sans difficulté les évolutions des nombreux personnages, dotés d’une psychologie et d’un background particulièrement détaillés. C’est sûr, on est gâté pour ce qui est de l’action, mais la cerise sur ce gâteau au gout âcre comme celui du sang versé à longueur de pages, c’est la relation amoureuse placée sous le sceau du plaisir et de la douleur qu’entretiennent Carver et Gretchen, alias Miss Misery. Alors voilà, toutes les pièces méticuleusement placées au cours des trois premiers volumes, s’emboitent parfaitement dans ce qui ressemble à une apogée dramatique. Le récit est remarquablement servi par le dessin, qui met les ombres constamment en évidence. Mention spéciale à la coloriste, qui relevait le défi de succéder à Alex Sinclair et Tony Aviña, deux spécialistes émérites. Enfin, il ne reste qu’à souligner l’excellence de la fin pour vous dire qu’il s’agit d’un classique qui ravira ceux qui aiment le polar teinté d’anticipation.