L'histoire :
New York, quartier du Queens. C’est là que grandit le jeune Richard, dans une famille juive venue d’Europe de l’Est. Curieux avant tout, il trompe l’ennui en cours en potassant les livres de calcul différentiel que son professeur lui donne pour l’occuper. Il décroche alors une bourse pour aller étudier au Massachusetts Institut of Technologie, avant de partir à Princeton où il passe son doctorat. A peine celui-ci est il obtenu (à l’âge de 24 ans) que Feynman est embauché dans le projet Manhattan à Los Alamos. La guerre achevée, les universités américaines se l’arrachent : il refuse Berkeley puis Princeton et enseigne successivement à Cornell puis au California Institute of Technology. C’est là qu’il produit ces travaux scientifiques les plus célèbres : l’électrodynamique quantique relativiste, la physique de l’hélium superfluide, la théorie des interactions faibles… Ces travaux lui valurent le prix Nobel de physique en 1965. A Caltech, il écrivit également le « Cours de Physique de Feynman », modèle de clarté et de pédagogie qui reste encore aujourd’hui une des références. A la fin de sa vie, il participa à la commission d’enquête sur l’explosion de la navette spatiale Challenger où son point de vue iconoclaste fut remarquable. Bref, nous traversons avec Feynman l’histoire de la physique du XXème siècle. Mais pas seulement, car il fut aussi un musicien, un dessinateur, un libre-penseur qui, professeur et prix Nobel, n’hésita pas à aller témoigner de la moralité des bars topless où il allait régulièrement croquer les hôtesses sur son carnet à dessin.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Jim Ottaviani au scénario et Leland Myrick au dessin placent Richard Feynman en vedette américaine, au centre de ce très sensible roman graphique. Ils se sont largement inspirés des ouvrages non scientifiques de Feynman tel que Vous voulez rire, monsieur Feynman ! et lui prêtent souvent ses propres propos. Ainsi, dès l’âge de cinq ans, notre héros apprend à remettre en cause l’autorité et à admettre son ignorance : caractéristiques utiles à un professeur et pour mener l’enquête sur la catastrophe de la navette Challenger. Il n’hésitera pas alors à dénoncer le management, allant à l’encontre de ce que les professionnels de la politique souhaitaient transmettre comme message au public. Depuis lors, Richard Feynman est devenu une icône et de nombreuses biographies fleurissent outre-atlantique sur ce personnage atypique : tantôt chercheur s’enfermant des jours pour noircir des rames de papier, afin de percer les lois de la nature, tantôt hédoniste passant un an à Copacabana dans une école de Samba… Toute cette complexité d’un être d’exception est parfaitement transmise au lecteur dans ce remarque ouvrage qui parvient à capter l’essence de Feynman. La scène finale est un modèle du genre : malade du cancer qui va l’emporter sous peu, Feynman se promène en montagne avec un ami qui lui confie être triste parce qu‘il (Feynman) va mourir. Sa réponse est grande à l’image du personnage : « Ouais, parfois cela m’énerve aussi. Mais pas autant que tu crois. Tu vois, quand tu arrives à mon âge, tu commences à réaliser que de toute façon, tu as déjà dit tout ce que tu savais de bon aux autres. » Silence, puis « Tu sais quoi ? Je te parie que je trouve une meilleure route pour rentrer. » Il disparaît, nous laissant seuls… Au revoir Monsieur Feynman et merci messieurs Ottaviani et Myrick pour ce modèle de roman graphique.