Donny Cates est certainement LE scénariste du moment ou au moins l’un des plus en vogues. Chacun de ses comics est une petite pépite unanimement saluée par les critiques, indice flagrant d’un grand talent qui va fracasser tout sur son passage. Car l’art du scénariste est d’une insolence et d’une facilité déconcertantes. Cates aime les récits audacieux, bien ficelés, tout en apportant une modernité et une liberté de ton assez folles. Subtil mélange entre intelligence et provocation, le style du génial scénariste a déjà tous les attributs d’un très grand artiste. D’ailleurs, avez-vous remarqué que ses initiales sont : DC ? Encore une autre provocation de l’enfant terrible de chez Marvel…
interview Comics
Donny Cates
Réalisée en lien avec les albums Cosmic Ghost Rider, Le printemps des comics T6
Bonjour Donny Cates. Comment as-tu démarré en tant que scénariste de comics ?
Donny Cates : Je voulais être un dessinateur à la base. J’ai travaillé dans un magasin de comics à Austin mais ils ont fermé. Je suis allé dans une école d’art pour apprendre à être un dessinateur. J’étais en cours avec Geoff Shaw avec qui j’ai fait plus tard God Country ou Thanos. Quand j’ai vu comment il travaillait, je me suis dit que je ne pourrais jamais y arriver ! J’ai donc suivi des cours d’écriture et de scénario. Je n’avais jamais rien écrit de ma vie jusqu’à l’âge de 22 ans. Je suis scénariste depuis seulement dix ans environ. J’ai eu un très bon professeur qui m’a pris sous son aile et qui m’a dit d’essayer. J’ai essayé en espérant que je sois bon un jour ! J’ai fait mes propres comics puis quand je suis arrivé chez Marvel, je savais exactement où je voulais être dans ma vie. Travailler là dans ces bureaux, voir le script arriver tous les jours : pour moi, c’était ça que je voulais faire. J’ai donc fait mes propres comics. J’ai travaillé pour Dark Horse, Heavy Metal puis j’ai finalement écrit un comics chez Image Comics: God Country. Ils ont beaucoup aimé ce comics et ils ont voulu que j’en fasse d’autres.
Ton style d’écriture est originale et plutôt rock’n roll ! Peut-on dire que tu es le « bad boy » de chez Marvel ?
DC : Tout le monde dit cela ! (rires) C’est juste parce que j’ai des tatouages sur les mains… J’e******* tout ça ! Je fais sûrement des comics percutants et forts. Je construis mes histoires comme si chacune d’entre elle est un event. Chaque numéro que je créé est pour moi le plus important de tous ceux que j’ai écrit. J’ai grandi avec les comics forts des années 90 qui étaient extrêmes. Tu le sais aussi tu en as un sur toi [il montre mon tatouage de… Spawn ! N.D.L.R. ]. Tout cela m’a beaucoup inspiré. C’est comme une question de vie ou de mort chaque mois. Je ne sais pas ce que « bad boy » signifie : je suis plutôt gentil !
Tes histoires sont très intelligentes et élaborées. Comment travailles-tu ?
DC : Je ne sais pas. Je travaille beaucoup. (rires) J’écris deux scénarios par semaine. Parfois, je finis à peine un projet que j’en commence un autre et les deux se chevauchent. Il y a des périodes où j’ai une histoire tous les trois jours pendant à peu près six mois. C’est un peu trop ! Je suis assez obsessionnel sur le fait de rendre le travail à temps et d’utiliser correctement mon emploi du temps. J’ai besoin d’avoir toujours quelque chose à faire tout le temps. Je me disperse sur des mauvaises choses si je ne reste pas concentré et impliqué. C’est parce que j’écris beaucoup que j’ai besoin d’avoir un plan précis dans la tête, comme une sorte de chemin à suivre. C’est pour ça que l’on peut voir chez Marvel que mes productions semblent connectées entre elles. J’ai souvent le plan dans la tête depuis longtemps. Quand je réalise un comics, il est souvent prévu quatre ou cinq ans à l’avance. J’avais pensé à l’histoire de Venom depuis cinq ans et je n’ai pas changé une seule virgule au script. C’est une façon pour moi de rester cohérent.
Pourquoi sembles-tu aussi fasciné par la Cosmologie ?
DC : Je ne sais pas. Je pense que, quelque part, chaque écrivain ou scénariste écrit sur les choses qui l’effraient. Je parle beaucoup de la famille, des problèmes dangereux. Il y a aussi la peur de perdre le contrôle, la peur de Dieu, la peur de l’inconnu, de l’espace terrifiant, des abysses et des ténèbres. Toutes ces choses que l’on retrouve dans tout mon travail. Ce sont juste les thèmes qui m’empêchent de dormir la nuit.
Où iras-tu avec ce personnage étonnant Cosmic Ghost Rider ?
DC : Je trouve que c’est la chose la plus incroyable que ce personnage devienne si populaire. On ne pouvait pas imaginer une seule seconde qu’il y aurait des tee-shirts, des figurines et toutes ces choses sur lui ! Où irai-je avec lui ? J’ai une idée : j’ai d’ailleurs un plan pour chaque histoire. Dans la nouvelle série qu’écrit Dennis Hopeless sur ce personnage, j’ai écrit une dizaine de pages avec Geoff Shaw. Les deux créateurs de Cosmic Ghost Rider sont donc à nouveau réunis. Je suis très fier de ça. Avec cette nouvelle série, j’avais dit à Marvel que je voulais revenir à des thèmes plus sombres. Cosmic Ghost Rider est amusant et fou mais on oublie aussi que c’est le Punisher et il est donc énormément seul. Il est fou parce qu’il est triste ! Ces nouveaux épisodes seront donc plus violents et plus durs. Vous verrez ça bientôt !
Merci Donny !
Donny Cates, en interview pour Planetebd