En l'espace de quelques années, le dessinateur canadien Nick Bradshaw a pris ses aises chez Marvel. Présent sur divers épisodes ici et là, il a conquis les fans de super-héros avec ses prestations sur Wolverine & the X-Men puis sur les Gardiens de la Galaxie. Avec son trait évoquant Arthur Adams et des planches incroyablement détaillées, l'artiste ne cesse de convaincre, au point que la Maison aux idées lui confie même le visuel d'un héros de tout premier ordre à l'occasion de son simili-reboot All-New All-Different : Spider-Man. Profitant d'une courte pause dans le marathon qu'est la publication mensuelle de comics aux USA, Nick Bradshaw a fait un détour par la France et a rencontré ses fans lors de la 20e édition du Paris Manga & Sci-Fi Show. Nous y étions bien évidemment...
interview Comics
Nick Bradshaw
Réalisée en lien avec les albums Wolverine and the X-Men T1, Wolverine and the X-Men T2, Marvel Saga – V 1, T13
La première question n'est pas très originale : pourrais-tu te présenter et nous dire comment tu as commencé dans l'industrie des comics ?
Nick Bradshaw : Je m'appelle Nick Bradshaw, je travaille actuellement pour Marvel Comics et j'ai d'abord essayé de percer dans ce métier en publiant de manière indépendante. Ça devait être aux alentours de 2000. Je commençais alors tout juste à mettre mon travail sur internet et j'ai eu la chance d'être remarqué par un éditeur. Il travaillait alors pour Dynamite et j'ai commencé là-bas avec les comics Army of Darkness, ce qui a été très fun. Ça m'a permis ensuite de passer à Wildstorm, avec DC Comics, puis j'ai fini par travailler pour Marvel.
Quelles sont tes influences ?
Nick Bradshaw : J'ai tendance à aller vers les dessinateurs au style plutôt cartoony. J'ai été un grand fan de Mike Wieringo, Michael Golden, Alex Toth, Arthur Adams – bien sûr, une des mes plus grandes influences, j'ai toujours été un grand fan de l’œuvre d'Arthur et j'ai toujours été incliné vers ça... Mais aussi Wally Wood, des classiques et des illustrateurs plus anciens comme Mark Schultz... J'ai toujours été fan de ces mecs.
Pourrais-tu décrire ton style ?
Nick Bradshaw : Bien sûr ! Si je devais décrire mon style, je dirais que c'est quelque chose qui s'approche du domaine de l'animation, d'assez cartoony. J'ai travaillé dans l'animation pendant à peu près 4 ans donc à mes yeux c'est là que j'ai fait mes armes avant de m'aventurer dans le monde des comics par la suite.
Si ma mémoire est bonne, tu as commencer par travailler sur Army of Darkness puis sur Danger Girl. Que penses-tu de ces séries, aujourd'hui ?
Nick Bradshaw : Oh, je suis un vrai nerd, un gros fan de films et en particulier des grands classiques parmi les films d'horreur. Ca a donc été super de pouvoir commencer ma carrière en travaillant sur Army of Darkness alors que j'étais un grand fan du matériau d'origine. Danger Girl, par contre, ça été un peu flippant de passer sur cette série parce qu'à l'époque, je n'étais pas très doué pour dessiner des femmes. C'était vraiment un plongeon dans le grand bassin, pour moi. J'ai appris à me débarrasser de pas mal de mes mauvaises habitudes en travaillant sur cette série, travail qui s'est avéré très fun à faire. Et ça m'a aussi préparé à la suite, en quelque sorte. J'ai aussi pu travailler avec un excellent éditeur, sur Danger Girl : Scott Dunbier – il travaille maintenant à IDW –, qui m'a très bien conseillé. Tout ça m'a appris qu'on doit toujours chercher à s'améliorer et c'est la raison pour laquelle commencer avec ces projets s'est avéré aussi important pour moi. Alors, quand je regarde en arrière et que je revois ces projets, je les considères comme mes vrais débuts dans le métier, ceux qui m'ont formé.
Tu as vu que l'univers d'Evil Dead aller passer au format télé ?
Nick Bradshaw : Oui, la nouvelle série commence à la fin du mois.
Tu attends ça avec impatience ?
Nick Bradshaw : Je n'ai pas le câble alors je sais que je ne devrais pas dire ça mais je vais le télécharger ! Enfin, bon, j'achèterai le blu-ray à sa sortie.
La série la plus populaire sur laquelle tu as travaillé, c'est Wolverine and the X-Men. C'est une série comportant un grand nombre de personnages et aussi une série qui a duré un grand nombre de numéros. Qu'as-tu retenu de cette expérience ?
Nick Bradshaw : Quand j'étais gamin, les New Mutants m'ont vraiment marqué. J'aimais beaucoup les X-Men, dans les années 80 avec toutes ces grandes aventures. Ce qui m'a intéressé, ici, avec Wolverine and the X-Men c'était ce concept de nouveaux mutants destinés à une nouvelle génération. C'est ce qui m'a le plus éclaté de faire avec cette série. Le plus fun, donc, a été de prendre ces personnages qui avaient pas ou peu de background et de développer leurs personnalités. J'ai vraiment aimé faire ça et les scripts de Jason [Aaron] étaient complétement dingues, tu vois ce que je veux dire ? Des aventures folles : Wolverine qui emmène des gamins dans un casino de l'espace, des bastons avec des clowns zombies... Dès que je recevais ces scripts, je me disais « il faut absolument que je dessine ça » voilà ce que j'ai retenu de cette aventure : ça a été une éclate totale.
Comment s'est passé ta collaboration avec Jason Aaron ?
Nick Bradshaw : Jason et moi sommes tous deux des enfants des années 70 et 80, alors quand on se retrouvais tous les deux on passait souvent notre temps à plaisanter sur le fait de faire un comics comme les grands classiques de Man-Thing ou bien Moon Knight, ce genre de trucs des années 70, les bouquins avec lesquels on a grandi. On finissait toujours par discuter de ça pour, au final, ne parler de Wolverine and the X-Men que pendant 5 minutes. Le truc marrant, avec Jason, c'est que tout ce qu'il a envie de te voir illustrer dans le comics qu'il a écrit se trouve là, dans le script. Dès qu'on discutait, on cherchait à savoir vers quoi on se dirigeait après, qu'est-ce qu'on allait faire ensuite ? Où veut-on emmener ces personnages ? Et c'est fun de travailler avec un auteur qui se projette aussi loin.
Tu fais partie de ces auteurs qui montent, chez Marvel. Qu'est-ce que ça te fais ?
Nick Bradshaw : Pour moi, c'est juste mon boulot. Les gens aiment bien mettre des étiquettes, du genre « ouais, c'est le nouveau prodige de chez Marvel » ou je ne sais quoi d'autre encore mais, pour moi, c'est juste un truc que je fais et qui me permet de travailler sur des projets super intéressants. Tiens, en ce moment, je travaille sur un projet lié à Spider-Man, destiné aux lecteurs de tous âges et qui va être traduit pour être distribué partout à travers le monde. Le but est de permettre à toute une génération de redécouvrir le personnage de Peter Parker et je m'amuse beaucoup à travailler là-dessus. Pour moi, donc, l'important est de pouvoir travailler sur ce genre de projets. C'est à la fois une leçon d'humilité et une expérience très amusante. Je suis très heureux d'avoir un travail dans lequel je peut m'éclater autant. Je me lève, le matin, et j'ai juste hâte de pouvoir me mettre à dessiner.
Es-tu prêt pour le All-New, All-Different Marvel ?
Nick Bradshaw : J'ai déjà commencé à travailler sur Spider-Man, j'ai fini les 3 ou 4 premiers numéros.
En France, on va découvrir le All-New, All-Different Marvel dans 4 ou 5 mois. Est-ce que tu peux nous donner un avant-goût de ce qui nous attend, venant de ton côté ?
Nick Bradshaw : Après Wolverine and the X-Men, j'ai travaillé sur Gardiens de la Galaxie pendant 4 ou 5 numéros et, donc, après, ce sera Spider-Man.
Mais qu'est ce qui va se passer, dans Spider-Man, donc ?
Nick Bradshaw : Oh, c'est ça qui vous intéresse ? Ce qu'on souhaite faire, c'est se replacer dans la continuité du titre. L'histoire même de Peter Parker va coïncider avec ce qui est fait dans Amazing Spider-Man. On va donc voir comment Peter Parker a grandi et le truc marrant, c'est qu'à chaque numéro, on va avoir une aventure à part entière. On va la faire à l'ancienne, pas besoin de savoir ce qui s'est passé dans les 5 numéros précédents et pas d'entraves dues à un arc en cours. Ça va être très fun. C'est écrit par Robbie Thompson qui est un des producteurs de la série télé Supernatural que vous devez connaître. Il sait comment faire pour obtenir ce format sérialisé. À chaque numéro, Peter Parker va se retrouver à combattre ses ennemis les plus classiques: Sand-Man, le Vautour... C'est très cool.
Est-il difficile de réinventer Spider-Man ?
Nick Bradshaw : Pas du tout. C'est pas comme avec les Ultimates. Ce qu'on essaie de faire, c'est de revenir à un format classique, revenir au Peter Parker en tant que « nerd », Parker l'intello qui se fait tabasser tout le temps... On revient aux origines mêmes du personnage.
Parmi tous les personnages que tu n'as pas encore eu la possibilité d'illustrer sur une série régulière ou pour un titre à part entière, sur lequel aimerais-tu pouvoir travailler ?
Nick Bradshaw : Oh, Hulk. J'ai même dit à Marvel que je le ferais gratuitement s'ils me le proposaient mais rien ne s'est fait, encore. Un jour, peut-être ?
Peux-tu nous parler des tes futurs projets ?
Nick Bradshaw : Non ! [Rires.] Pas maintenant ! Mais en général, je fais toujours 5 ou 6 numéros par-ci par-là et je ne sais jamais ce qui va suivre. Je suis toujours le dernier informé.
Si tu avais le pouvoir cosmique de visiter le crâne d'un autre auteur pour en comprendre le génie, qui irais-tu visiter ?
Nick Bradshaw : Je dirais Warren Ellis. Autant j'aime ce qu'il fait, autant j'aimerais qu'il se pose là, en face de moi, et pouvoir comprendre comment il fait pour coucher ces trucs sur papier. J'adorerais comprendre comment ce mec fait pour écrire ses scripts.
Merci Nick !
Remerciements à Alain Delaplace pour la traduction méticuleuse !