L'histoire :
Hiroshi est avec une jeune femme dans un petit restaurant et, après lui avoir fait un petit discours sur l’intérêt de sa vie, il lui annonce qu'il a trouvé du travail dans un cabinet juridique. Lorsque la serveuse arrive et demande s’il faut resservir à boire, Hiroshi refuse et décident de partir avec son interlocutrice. La serveuse est plutôt satisfaite de le voir s’en aller : elle ne l'apprécie pas car il parle toujours à un personnage imaginaire. Le lendemain, une fois à son entretien, Hiroshi se fait expliquer la teneur de son travail : il est désormais employé en tant qu'exécuteurs suppléants de vengeance, c'est-à-dire qu'il va devoir tuer des gens pour accomplir des vengeances personnelles. En apprenant cela, Hiroshi n'a pas vraiment de réaction mais il se montre ébranlé quand Higuchi, une des employées de la société, apparaît : celle-ci est le portrait craché de la jeune femme imaginaire avec qui il parlait au restaurant...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Freesia est un manga d'anticipation qui nous présente un Japon en guerre contre une "force impérialiste chrétienne" et où la vengeance personnelle est légalisée : un tribunal fixe la date et l'heure laquelle la personne va être exécutée et on fournit à cette dernière un revolver et le droit d'avoir un protecteur pour se défendre. Avec un sujet aussi subversif, ce titre fait bien évidemment penser à Ikigami - préavis de mort mais en beaucoup plus sombre et glauque. Tout d'abord, il s'agit d'exécuter des personnes (même si celles-ci ont purgé une peine de prison pour leurs actes) mais ces dernières ont tout de même le droit de se défendre en tuant leur exécuteur. Du fait de cette légalisation, des bureaux d'exécuteurs suppléants se sont créés (pour éviter aux gens de se salir les mains eux-mêmes) et l’histoire nous invite donc à suivre Hiroshi, un jeune homme très déséquilibré qui va intégrer un de ces offices dont les employés sont pour le moins louches. A travers deux missions menées par l'équipe intégrée par Hiroshi, on découvre une partie du fonctionnement de ce système qui est de surcroît en proie à la corruption : l'immersion dans le récit est donc éprouvante (d'autant qu'il s'ouvre sur un viol) mais intéressante. De plus, les personnages ont tous un côté mystérieux et dérangé (à commencer par Hiroshi qui parle à des personnages imaginaires dans les lieux publics), ce qui renforce la sensation de malaise et l'ambiance générale. Pour ce qui est des graphismes, ceux-ci sont assez particuliers et certains lecteurs auront du mal à s'habituer au style qui dégage une ambiance volontairement "sale" (et qui rappellera Dorohedoro, chez Soleil). Pour le reste, la mise en scène est soignée, les décors sont nombreux et possèdent une multitude de détails, et les personnages sont expressifs et font parfois froid dans le dos. On regrettera cependant la présence de scènes de sexe qui, si elles sont bien dessinées et montrent pour une fois des poils pubiens (ce qui est déjà une provocation en soi dans un manga), desservent tout de même le scénario : cela relève surtout du racolage et on a du mal à croire au personnage de Keiko qui aime se faire prendre par n'importe qui plusieurs fois par jour et si possible devant la mère apathique de Hiroshi... En tous cas, ce premier volume ne manquera pas de faire sensation et, si son côté extrême risque d'en rebuter certains, l'histoire est en tout cas intéressante.
