L'histoire :
Cette guerre est dite avoir duré cent ans. La campagne française est traversée de bandes de vrais et faux chevaliers, pillant et troussant à leur guise. La vie continue pourtant bon an mal an. La jeune Mariotte revient de la rivière les bras chargés de seaux d’eau. L’attend sur le chemin l’Anicet. Mariotte est belle mais rousse et vit avec sa grand-mère en marge du village. Les jeunes de son âge se plaisent à la calomnier, à la chamailler : ils la traitent de « sorcière ». Cette fois encore, Mariotte ira à l’eau pour échapper à pire (…). Un peu plus loin, Mariotte croise une bande d’hommes en arme. Sans réfléchir, pour se venger, elle les envoie au village. Rentrée chez elle, sa grand-mère lui en fait le reproche : si l’on meurt par sa faute, qu’elle ne revienne plus en cette maison ! Mariotte repart pour le village afin de devancer si possible les éventuels vandales. Retardée par les loups, elle n’arrive qu’au matin. Il est trop tard. Le village est en ruine. Tous sont morts. Seul l’Anicet se dandine au bout d’une corde, la pointe des pieds en équilibre sur une barrique, quand passe un chevalier retardataire. L’homme est philosophe. Voyageant seul, la compagnie d’un écuyer ou d’un valet serait peut-être la bienvenue. Peut-être, à la condition que sa jument, la Ludie, veuille bien de lui…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Passés aux éditions 12bis, les différents titres de François Bourgeon sont tous réédités sous leurs nouvelles couleurs. François Bourgeon s’est illustré dernièrement aux confins de l’univers avec Le cycle de Cyann. Les passagers du vent, sa série maître, se déroule en mer au temps des corsaires. On oublie parfois qu’il est l’auteur d’une trilogie moyenâgeuse mâtinée de fantastique : Les compagnons du crépuscule. L’aventure débutée en février 1984 avec Le sortilège des brumes, elle conte le périple d’un chevalier errant défiguré par la jalousie de ses pairs, rejoint par un jeune sot prénommé Anicet et une donzelle malicieuse, la Mariotte. Le cadre est payant : la Guerre de cent ans. Il offre en effet un écrin propice à l’illustration des affres du temps – tueries, pillages, viols, etc. – mais aussi aux facéties et à la magie qui fait le charme de l’époque. L’intrigue présente ainsi une première partie charpentée par des réalités brutes (agrémentées du verbe savoureux de l’auteur) puis bascule, à l’entrée dans un marais, dans la féerie – d’où le titre. De petits diables de lutins s’invitent aux rêves de nos compagnons, semant la confusion. Quid du rêve et de la réalité ? La vie de nos amis est-elle menacée…? Bourgeon fait montre de son talent et, s’il l’on peut préférer la vraisemblance historique des débuts, le délire au pays des songes confère à l’œuvre une balade originale, une sorte de fantaisie macabre. Etonnement, ni le trait, ni la couleur, ni bien sûr le ton du titre, n’ont vieilli. On trouve en final un carnet de croquis et un développement sur « l’animal de Tollund » dont s’est inspiré Bourgeon. S’il est un terme qui épouserait sans doute l’œuvre de l’artiste, c’est celui d’aventure. Celle-ci était partie il y a plus de vingt ans sur des chemins excellents ; elle continue sur un même ton avec Les yeux d’étain de la ville glauque…