L'histoire :
Un train roule à vive allure dans les montagnes en direction de Bruxelles pour pas moins de 24 heures d’arrêt après deux jours de chemin de fer. Traversant Bruxelles-City d’un pas hésitant, tout en ignorant les conseils du vieux sage Daniel l’Ermite, B cherche A. Garçonne, venue en calèche, sourde aux avertissements d’une comparse de voyage, A, elle, cherche B, qui se fait appeler Espoir Du Soir. À l’Hôtel Métropole. A se cacherait sous le doux nom d’Incartade – comme le parfum – tandis que B se trouve, lui, poursuivi par des indiens de cinéma. Très vite, il en vient de partout et B est capturé. Enchaîné à un poteau, il fait face au grand chef des indiens pour lui expliquer sa quête : il veut retrouver A pour la regarder, mais il a peur de ne plus lui plaire. C’est alors que Chokolé, la fée Cheyenne qui a appris qu’un visage pâle avait été capturé, lui fait boire un étrange breuvage. B découvre alors que A est bien passée par l’Hôtel Métropole, mais elle est déjà partie. Il ne peut que la voir s’échapper à l’horizon. De son côté, A se présente elle aussi à l’hôtel pour retrouver B. En son absence, elle décide de prendre possession de sa chambre. Elle y découvre un fil tendu qui donne au dehors. À la manière d’un funambule, A marche sur la corde, passe la fenêtre et traverse différents mondes en guerre jusqu’à arriver à B, encore attaché au poteau. Plus tard, ils se réveillent dans un lit de l’hôtel, s’abandonnant ensemble dans une profonde intimité, ouvrant la voie à un amour intense, absolu…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Déconcertant. C’est le premier mot qui vient à l’esprit quand on lit les premières planches de La Mer à boire. Mais les aficionados de Blutch (La volupté, C'était Le Bonheur) ne seront pas perdus pour autant, puisque l’artiste développe ici une histoire amoureuse dont il a le secret. C’est sous le signe du décalage que l’homme nous sert une narration qui part dans tous les sens, afin de prendre un malin plaisir à amener le lecteur à réfléchir et à appréhender toutes les émotions des personnages. À la fois aventure rocambolesque et introspection à la limite de l’onirisme, cette bande-dessinée étrange est une véritable ode à la rencontre amoureuse qui s’affranchit de toutes les conventions du récit. Ainsi, chaque scène qui s’enchaîne dévoile de nouvelles facettes de la psyché des personnages pour se figer dans un tout à la fois incohérent… mais cohérent ! En ce qui concerne la partie graphique, Blutch délivre des dessins avec un trait rapide qui jouent peu avec les détails mais plutôt sur les sentiments d’urgence, le tout sur un rythme haletant. De plus, l’artiste a opté pour une mise en couleur directe à l'encre, pour renforcer l’onirisme de l’ensemble. Au final, cette œuvre forte et complètement décalée risque de perdre certains lecteurs non aguerris à l’univers de Blutch, mais son esprit de liberté est omniprésent à travers chaque planche. Un album original qui fait du bien !
