L'histoire :
Désormais colonel, de Gaulle dérange énormément les grands généraux français du haut-commandement. Avec son ouvrage « de l’armée de métier » il fait grincer des dents. Alors que le président de la République Albert Lebrun le félicite, de Gaulle l’impétueux lui demande de suivre ses conseils pour éviter « le désastre ». Lebrun est choqué, mais Paul Reynaud l’écoute. Alors ministre des finances, il remplace quelques jours plus tard le premier ministre Daladier avec l’aide de Léon Blum. Hélas, sa proposition de nommer de Gaulle au gouvernement est repoussé, notamment par le parti radical de Daladier. Sûr de son fait, de Gaulle continue d’asséner ses idées de manière brute et sans détour, ce qui le fait passer pour un fat par le général Gamelin notamment. Les deux hommes ne s’apprécient guère. De Gaulle est détesté de tout l’establishment militaire et politique. Seul Paul Reynaud le soutient, mais sa marge de manœuvre politique est restreinte, et le jeune colonel ne fait rien pour l’aider. Alors qu’il remporte un succès militaire dans les Ardennes, la déroute qu’il prophétise depuis des années est alors inéluctable…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Alors que le premier tome nous présentait un de Gaulle jeune et impétueux, Claude Plumail et Jean-Yves Le Naour nous présentent ici la période fondatrice de la « légende » de Gaulle, des débuts de la deuxième guerre mondiale à la débâcle de juin 40. C’est un moment important de notre histoire, mais aussi un miroir grossissant sur l’incapacité des élites françaises à se renouveler, à écouter. Les Gamelin, Daladier, Lebrun, Pétain sont sûrs de leur fait, assis sur leurs certitudes, incapables de se remettre en question. De Gaulle, lui, ébranle toutes leurs certitudes et prophétise l’inutilité de la ligne Maginot, l’inéluctabilité de la défaite de l’armée française, restée coincée au XIXème siècle. Le problème, c’est que de Gaulle est aussi sûr de lui, fermé, hautain que ses détracteurs. Il livre combat de coqs sur combat de coqs jusqu’au moment où il est le dernier espoir de la France. C’est certainement là, et de très loin, qu’il est le meilleur. Quand il n’y a plus que lui. Et l’appel du 18 juin par lequel se termine l’opus donne au lecteur des frissons, tant la charge dramatique qui est y concentrée est forte. La manière dont Le Naour, professeur d’Histoire et scénariste, récite ce moment d’Histoire est captivant. De Gaulle va d’échec politique en échec politique, il se mesure à ses supérieurs, est désavoué en permanence, a raison contre tous en permanence. Les dialogues sont savoureux et les apartés pas moins. On glisse rapidement vers la défaite, malgré la volonté de de Gaulle et les tentatives un peu timides d’un Reynaud au costume un peu trop grand. La ligne claire de Plumail permet une lecture aisée et agréable à la fois, tant les personnages sont ressemblants. L’histoire ne se prête guère à un récit très rythmé, mais le découpage est riche et chaque vignette renferme un bon morceau de plaisir, malgré la frustration et la colère que l’on ressent face à l’inéluctabilité de la défaite. Un deuxième pari réussi pour le duo, pour cette série grande comme son sujet…